Mercredi 7 mai, 133 cardinaux se réuniront pour élire le prochain chef de l’Église catholique. Le cardinal Christoph Schönborn, archevêque de Vienne, manquera à l’appel, écarté de peu par le critère de l’âge. Le comte Christoph de Schönborn aurait pourtant pu renouer avec la tradition des papes issus des grandes familles ayant joué un rôle important au sein de l’Église. Plusieurs membres de sa famille ont été évêques et ont régné en même temps sur des principautés ecclésiastiques.
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Qui est le comte Christoph de Schönborn, archevêque de Vienne ?
Le comte Christoph de Schönborn est né au château de Skalka, en Bohême, le 22 janvier 1945. Le comte Christoph est le fils du comte Hugo-Damian de Schönborn, chef de l’ancienne famille comtale, et de la baronne Eleonore von Doblhoff, une femme politique issue d’une famille de la noblesse allemande chassée de Tchécoslovaquie. La famille de Schönborn fait partie de ces grandes familles ayant des liens étroits avec l’Église. Hugo-Damian a lui-même reçu ce prénom en hommage à deux éminents membres de la famille dont l’un fut prince-évêque du diocèse de Spire et prince-évêque de Constance au 18e siècle, l’autre fut un conseiller de l’empereur à la même période.

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Le comte Christoph est rentré chez les Dominicains à l’âge de 18 ans, à Warburg, en Westphalie. Il a été ordonné prêtre en 1970 et a même eu Joseph Ratzinger, futur Benoît XVI, comme professeur. À la mort de son père en 1979, c’est son frère aîné, le comte Philipp, qui deviendra le nouveau chef de la famille comtale. Christoph Schönborn (la particule étant interdite par la loi en Autriche) deviendra professeur de théologie en Suisse. En 1991, le pape Jean-Paul II le nomme évêque auxiliaire de Vienne et il deviendra l’archevêque de Vienne en 1995. Président de la conférence épiscopale autrichienne en 1998, Jean-Paul II le créera cardinal la même année.
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Le cardinal Schönborn ne pourra pas participer au conclave
Le cardinal Schönborn ne fait malheureusement plus partie de la liste des papabili depuis janvier 2025, ayant fêté son 80e anniversaire en début d’année. Il n’y aura donc pas de Schönborn à la tête de l’Église, dans la lignée des grandes familles pontificales ou cardinalices, comme les Orsini, les Borgia et le Colonna. Le frère de son arrière-arrière-grand-père fut lui aussi cardinal et archevêque de Prague.
Le pape est dépositaire d’un double pouvoir. Il détient un pouvoir spirituel puisqu’il est à la tête du Saint-Siège, qui est le gouvernement pastoral de l’Église catholique, et un pouvoir temporel, car il règne sur le Vatican. Fait assez étonnant, plusieurs ecclésiastiques de la famille de Schönborn ont eux-mêmes reçu des pouvoirs souverains par le passé. Par exemple, l’archevêque de Mayence de la famille de Schönborn a régné sur Mayence, qui fut une principauté électorale dont le souverain était le prince-archevêque. Il en va de même pour l’évêché de Bamberg ou encore l’évêché de Worms, celui de Wurtzbourg et celui de Spire à la tête desquels ont régné des évêques de la famille de Schönborn. En outre, la famille de Schönborn possédait un fief en Franconie qui avait l’immédiateté impériale en tant que comté (depuis 1701- au sein du Saint-Empire romain germanique, le territoire de Schönborn. Par la suite, le comté de Schönborn va être divisé en plusieurs territoires sur lesquels vont régner plusieurs branches de la famille. Le chef de la branche de Bohème est le frère aîné du cardinal Christoph.

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L’âge d’or des Schönborn et leurs églises baroques
Les liens des Schönborn avec l’Église ne s’arrêtent pas là. Plusieurs évêques de la famille ayant été des princes souverains, ceux-ci ont grandement contribué à la construction d’églises dans le sud des territoires germaniques. Ces églises de style baroque sont tellement nombreuses que le terme Schönbornzeit, soit l’âge des Schönborn, désigne ces églises construites entre 1642 et 1756 durant une période de prospérité. Une partie de ces édifices, qui comprennent des églises, chapelles, abbayes et basiliques mais aussi de nombreux palais et résidences ecclésiastiques, est l’œuvre de Balthasar Neumann, qui était l’architecte de la cour du prince-évêque Schörnbon de Würzbourg.

Le cardinal Christoph ne cache pas ses nobles origines ni les liens forts que sa famille a maintenus avec le pouvoir impérial. Depuis 1961, le comte Christoph est chevalier de l’ordre de la Toison d’or de la branche autrichienne. En tant qu’ecclésiastique de haut rang, il est devenu le grand chapelain de cet ordre aujourd’hui dirigé par l’archiduc Carl de Habsbourg-Lorraine, petit-fils de l’empereur Charles 1er. Le comte revendique aussi être un descendant de sainte Ludmilla, une princesse de Bohême, fille du prince Slavibor qui a régné sur la Bohême au 9e siècle. Le cardinal Schönborn avait d’ailleurs célébré la messe d’hommage à sainte Ludmilla en 2021, à l’occasion du 1100e anniversaire de sa naissance.
Proche du pape François, Schönborn n’est pas conservateur sans pour autant être fondamentalement progressiste. Il s’est montré plutôt souple, privilégiant la compréhension et le bon sens, lorsqu’il a exprimé sa vision sur des sujets délicats comme la contraception, le célibat des prêtres, les réformes du clergé et l’homosexualité. Comme le veut la loi canonique, il a présenté au pape sa démission à l’archidiocèse de Vienne lorsqu’il a atteint 75 ans, en 2020. Comme le permet aussi la loi canonique, le pape peut accepter ou refuser cette démission. Le pape François a choisi de le reconduire pendant cinq ans, lui permettant finalement de prendre sa retraite à 80 ans en janvier 2025. Depuis quelques mois, il est donc archevêque émérite de Vienne et n’ayant pas encore de successeur, le poste reste vacant. Sur les 252 cardinaux que compte l’Église catholique, seuls 135 n’ont pas encore atteints l’âge de 80 ans et sont donc des potentiels candidats au trône de saint Pierre. Ils seront en réalité 133 en lice et présents au conclave, deux ayant annoncé ne pas vouloir participer. Le cardinal de Rabat a aussi annoncé sa renonciation.