Le discours du roi Felipe VI à Noël : « C’est avec l’unité, l’effort collectif et la solidarité que se construisent les grandes œuvres »

Ce 24 décembre, le roi Felipe VI d’Espagne s’est adressé à la population pour clôturer l’année 2023. Le roi d’Espagne prononce chaque année un discours lors du réveillon de Noël. Cette année, le roi Felipe a notamment insisté sur l’importance du respect de la Constitution, qui permet de maintenir l’union de l’Espagne, en cette période politique assez mouvementée.

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Le discours complet du roi Felipe du 24 décembre 2023

Le roi Felipe VI d’Espagne, 55 ans, a prononcé son discours de fin d’année, ce 24 décembre 2023. Le roi d’Espagne, comme le grand-duc de Luxembourg et le roi de Suède s’adressent chaque année à la population, le jour du réveillon. Le discours du roi Felipe, qui est signé par le gouvernement, vient conclure une année politique compliqué en Espagne.

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« Comme à chaque réveillon de Noël, j’ai l’occasion de vous féliciter pour Noël et de vous transmettre, ainsi que ma famille, nos meilleurs vœux. C’est une tradition que j’aime entretenir et qui me permet aussi d’apporter chez vous quelques réflexions sur notre présent et sur les défis auxquels nous sommes confrontés en tant que nation », a déclaré le roi Felipe au début de son discours.

« Les difficultés économiques et sociales qui affectent la vie quotidienne de nombreux Espagnols préoccupent tout le monde. Une préoccupation qui s’exprime notamment par rapport à l’emploi, à la santé, à la qualité de l’éducation, au prix des services de base. Bien sûr aussi avec la violence inacceptable contre les femmes ou, dans le cas des jeunes, avec l’accès au logement.

Il y a donc de nombreuses questions spécifiques que je voudrais aborder avec vous aujourd’hui, même si ce soir je souhaite me concentrer sur d’autres qui ont aussi beaucoup à voir avec le développement de notre vie collective. C’est à la Constitution et à l’Espagne que je veux faire référence.

Cette année, notre Constitution fête ses 45 ans. Au cours de ces années de vie démocratique, la Constitution, sur laquelle la Princesse des Asturies a prêté serment le 31 octobre dernier, a été présente sans interruption dans nos vies. Et c’est sans aucun doute le meilleur exemple d’union et de coexistence entre les Espagnols.

Nous ne pouvons pas oublier que l’un de nos grands atouts en démocratie est précisément cette coexistence basée sur des sentiments partagés et la recherche commune du bien-être et de la prospérité de tous.

Dans les Asturies en octobre dernier, j’ai souligné – et je le crois – que c’est avec l’unité, avec un effort collectif et avec des attitudes de solidarité que se construisent les grandes œuvres, celles qui transcendent les personnes, celles qui durent et restent dans le temps. C’est ainsi qu’un pays progresse.

Naturellement, en Espagne, chaque citoyen a le droit de penser, de s’exprimer et de défendre ses idées librement et dans le respect des autres. Mais la démocratie nécessite également un consensus fondamental et large sur les principes que nous partageons et qui nous unissent depuis plusieurs générations.

Et cette union, qui a de profondes racines historiques et culturelles, doit reposer avant tout sur les valeurs qui régissent toute coexistence démocratique : liberté, justice, égalité, pluralisme politique.

Ce sont les valeurs qui nous unissent, qui donnent force et permanence à un système démocratique comme le nôtre. Et c’est ainsi que les définit et les établit notre Constitution, qui a été le plus grand succès politique de notre histoire récente et qui a représenté le point culminant d’un processus qui méritait une admiration extraordinaire et une reconnaissance internationale.

Grâce à elle, l’Espagne a réussi à construire et à consolider une démocratie pleine, ouverte et inclusive, un État de droit social et démocratique, qui a assuré notre coexistence et qui nous a permis de surmonter diverses et graves crises de ces dernières années. C’est la réalité évidente de notre histoire constitutionnelle récente.

Grâce à la Constitution, nous avons réussi à surmonter la division, qui a été la cause de nombreuses erreurs dans notre histoire ; qui a ouvert des blessures, brisé des affections et éloigné les gens. Surmonter cette division a donc été notre principal succès il y a près de cinq décennies. Par conséquent, empêcher le germe de discorde de s’établir parmi nous est un devoir moral que nous avons tous. Parce que nous ne pouvons pas nous le permettre.

Et il y a une autre dimension de la Constitution que l’on ne remarque souvent pas, et qui est sans doute aussi très importante : Celle qui nous permet d’assurer notre modèle de vie, notre façon de vivre et de comprendre la vie. S’exprimer librement, recevoir une éducation, avoir un emploi ou se protéger de la maladie est sans aucun doute essentiel dans notre vie quotidienne. Il est également important d’avoir accès à un logement, de fonder une famille, de bénéficier de l’aide sociale ou d’avoir une retraite décente… Tous ces événements quotidiens – et bien d’autres encore – sont ce que la Constitution protège, garantit et protège.

C’est pour cette raison que je veux défendre la Constitution non seulement comme une valeur démocratique pour le présent et l’avenir, mais aussi comme un instrument et une garantie essentiels pour que la vie des Espagnols puisse continuer à se dérouler avec confiance, avec stabilité et certitude. Pour que nous puissions jouir librement d’une vie dans laquelle chacun – selon sa situation – peut voir ses attentes légitimes, ses ambitions, ses projets et ses besoins raisonnablement satisfaits.

Mais il est évident que pour que la Constitution développe pleinement sa mission, il faut non seulement la respecter, mais aussi préserver son identité, ce qui la définit, ce qu’elle signifie ; sa raison d’être est celle d’un accord collectif de tous et entre tous pour un objectif commun.

Et enfin, elle exige que nous préservions son intégrité en tant que lieu de reconnaissance mutuelle, d’acceptation et de rencontre approuvé par tous les Espagnols, en tant que détenteurs légitimes de la souveraineté nationale.

Par conséquent, sans respect de la Constitution, il n’y a pas de démocratie ni de coexistence possible ; il n’y a de libertés que d’imposition ; Il n’y a pas de loi, mais de l’arbitraire. En dehors de la Constitution, il n’y a pas d’Espagne en paix et en liberté. Et avec la Constitution, l’Espagne.

Nous, Espagnols, avons entamé une nouvelle voie il y a près d’un demi-siècle ; nous l’avons fait ensemble, démocratiquement, dans un projet commun. Nous approuvons une vision commune de l’Espagne qui reconnaît le droit de chacun à se sentir et à être respecté dans sa propre personnalité et sa culture ; avec leurs langues, leurs traditions et leurs institutions.

Et aujourd’hui, l’Espagne est une société forte, qui a démontré à plusieurs reprises les valeurs qui forgent notre sens en tant que communauté politique : Nous avons été solidaires avec ceux qui ont souffert de l’adversité ; Nous avons eu un comportement civique exemplaire pour surmonter le COVID ; Nous avons fait preuve de courage, de dignité et de principes face au terrorisme ; Et nous avons exprimé et surtout défendu nos valeurs constitutionnelles lorsque celles-ci étaient remises en question ou menacées.

Et nous avons également fait tout cela ensemble et conformément au cadre constitutionnel décidé par tous les Espagnols. La raison ultime de nos succès et progrès dans l’histoire récente a été précisément l’unité de notre pays, basée sur nos valeurs démocratiques et notre cohésion, sur les liens solides de l’État avec nos communautés autonomes et sur la solidarité entre elles toutes. Basé également sur notre ouverture sur le monde extérieur avec une profonde vocation ibéro-américaine et européenne. Justement, l’Espagne a présidé le Conseil de l’UE au cours du dernier semestre, au cours duquel l’unité de l’Europe a été renforcée.

Je suis convaincu que l’unité sera également la clé pour que nous puissions relever avec succès les futurs défis graves et complexes auxquels l’Espagne est aujourd’hui confrontée.

Pour aborder cet avenir, toutes les institutions de l’État ont le devoir de se comporter avec la plus grande responsabilité et de toujours rechercher les intérêts généraux de tous les Espagnols avec loyauté envers la Constitution. Chaque institution, à commencer par le Roi, doit se placer à la place qui lui correspond constitutionnellement, exercer les fonctions qui lui sont attribuées et se conformer aux obligations et devoirs que lui indique la Constitution.

Nous devons également respecter les autres institutions dans l’exercice de leurs propres pouvoirs et contribuer mutuellement à leur renforcement et à leur prestige. Et enfin, nous devons toujours garantir la bonne réputation, la dignité et le respect de notre pays.

Tout au long de son histoire, pendant des siècles, l’Espagne a eu la responsabilité d’influencer le cours de l’humanité. Car elle a également traversé des périodes de tragédie, de silence, d’isolement et de douleur. Mais le peuple espagnol les a toujours surpassés ; a réussi à vaincre, sachant choisir son chemin avec force et avec la fierté des personnes qui sont et veulent être.

Nous devrions prendre davantage conscience du grand pays que nous avons, afin de le ressentir davantage et d’en prendre soin ensemble. Nous pourrons ainsi mieux remplir l’obligation dont j’ai parlé il y a quelques semaines aux Cortes : celle de garantir aux jeunes générations l’héritage d’une Espagne unie, cohésive, avec une volonté de compréhension et solide dans ses convictions démocratiques, civiques et morales ; l’héritage d’une Espagne respectée, d’une nation bien-aimée, dans laquelle ils peuvent continuer à développer leur vie librement, en toute sécurité, dans un environnement de stabilité et de confiance.

L’Espagne continuera d’avancer. Avec détermination, avec espoir, nous le ferons ensemble ; conscient de notre réalité historique et actuelle, de notre vérité en tant que Nation. La Couronne sera toujours sur cette voie ; non seulement parce que c’est mon devoir de Roi, mais aussi parce que c’est ma conviction.

Merci pour votre temps ce soir et avec la Reine, la Princesse Leonor et l’Infante Sofía, nous vous souhaitons un joyeux réveillon de Noël, avec un souvenir très spécial pour ceux qui, en ce moment, avec dévouement et dévouement, assurent la sécurité de tous, et pour le fonctionnement des services publics. »

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Nicolas Fontaine

Rédacteur en chef

Nicolas Fontaine a été concepteur-rédacteur et auteur pour de nombreuses marques et médias belges et français. Spécialiste de l'actualité des familles royales, Nicolas a fondé le site Histoires royales dont il est le rédacteur en chef. nicolas@histoiresroyales.fr