Faut-il regarder Les derniers tsars sur Netflix ? La série est-elle historiquement correcte ?

Les abonnés de Netflix amateurs d’histoire et de royautés ont pu découvrir avec surprise qu’une nouvelle série venait d’être mise en ligne sur la plateforme. Les derniers tsars (The Last Czars, en version originale) est une série qui retrace l’histoire de la famille Romanov de 1894, date de l’accession au trône du dernier empereur Nicolas II, jusqu’à l’exécution de toute la famille en 1917.

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Faut-il regarder Les derniers Tsars sur Netflix ?

Nous ne sommes pas là pour juger de l’aspect cinématographique de cette série plutôt agréable à regarder, même s’il faut avouer que certaines images sont parfois de la qualité d’un bon téléfilm. Néanmoins, cette série est prenante et permet d’avoir un petit rappel historique bien résumé et simple à comprendre. Elle ne comprend que 6 épisodes d’une quarantaine de minutes, qui nous permettent de nous plonger dans la chute de l’Empire de Russie. Ceux qui auraient besoin d’un récapitulatif historique sur les événements politiques du début du 20e siècle et sur la fin de la dynastie des Romanov, peuvent tout à fait compter sur cette série pour remettre les événements au clair. La série est à 80% composée de scènes de fiction, jouées par des acteurs et 20% de scènes de style documentaire. Des images d’archive entrecoupent des scènes de fiction, afin d’encore mieux appréhender les événements de l’époque. Pour donner de l’autorité historique aux images, les scènes de fiction sous parfois soutenues par les propos d’historiens comme Marina Alexandrovna professeure à l’Université du Texas ou de Pablo de Orellana, du King’s College de Londres.

La série démarre avec la mort de l’empereur Alexandre III et l’accession au trône de Russie de son fils, Nicolas II (photos : Adrian J. McDowall/capture Netflix)

Que raconte la série The Last Czars ?

La série démarre avec l’accession au pouvoir de Nicolas II, un homme qui n’avait pas les épaules pour supporter le poids de cette tâche. Il est épaulé et surtout influencé par son oncle, le grand-duc Sergueï, très conservateur, qui refuse d’imaginer l’assouplissement de la monarchie absolue. En 6 épisodes, on suit la vie de la famille Romanov, dont le couple impérial apparait comme un couple uni, amoureux et solide. La tsarine Alexandra Fedorovna, née princesse Alix de Hesse, a déjà accouché de plusieurs enfants… toutes des filles. Lorsqu’elle mettra au monde son cinquième enfant, enfin un héritier mâle, on découvre que le tsarévitch Alexis est hémophile. On assiste aussi à l’arrivée romancée et parfois fantasque du moine et guérisseur Raspoutine à la cour de Saint-Pétersbourg. Rapidement, le peuple se rebelle et la famille impériale, totalement coupée de la réalité de la vie des paysans et autres citoyens russes, ne se rend pas compte qu’elle va droit à sa perte. En parallèle (dans un temps avancé), l’histoire suit l’authentification d’une femme désorientée qui prétend être la princesse Anastasia, ayant survécu au massacre de la famille.

Comparaison des acteurs et des vrais personnages de la série

Une chose est particulièrement appréciée, c’est la ressemblance physique des acteurs avec leurs personnages. Bien entendu, ceux-ci parlent anglais et quelques costumes donnent l’impression d’être un peu trop propres, mais il n’empêche que l’on se plonge facilement dans l’histoire et qu’il y a une véritable envie d’offrir un résultat réaliste de la part de la société de production londonienne Nutopia, qui a créé ce mégadoc, un nouveau format de séries qui mêlent fiction, images d’archive et commentaires d’experts face caméra.

L’acteur Robert Hack interprète le rôle de l’empereur Nicolas II de Russie (photos : Adrian J. McDowall/capture Netflix, Viktor Kornushin/Global Look Press)
L’actrice Susanna Herbert comparée à l’impératrice Alexandra de Russie, née Alix de Hesse (photos : Adrian J. McDowall/capture Netflix, Getty)
L’acteur Ben Cartwright dans la série de Netflix comparé à une photo de Grigori Raspoutine (photos : Adrian J. McDowall/capture Netflix, TASS)
L’acteur Oskar Mowdy comparé au tsarévitch Alexis (photos : Adrian J. McDowall/capture Netflix, Getty)
Comparaison de l’acteur Gavin Mitchell qui joue le rôle du grand-duc Sergueï (photos : Adrian J. McDowall/capture Netflix, Getty)

Quelles sont les erreurs historiques de la série Les derniers Tsars ?

Il y a évidemment quelques raccourcis pour vulgariser l’histoire. Il y a également quelques erreurs scéniques qui ont été pointées sur les réseaux sociaux. Un utilisateur de Twitter a fait une capture d’écran d’une image de la série sur laquelle on peut lire « Moscou, 4 février 1905 ». On y voit un paysage de Moscou sous la neige. Il a ensuite posté une deuxième image, trouvée sur Getty, et y a ajouté le titre ironique « Moscou, 5 juillet 2019 ». En effet, le réalisateur s’est contenté de prendre une image actuelle de Moscou sur la banque d’images Getty et de la modifier numériquement en ajoutant de la neige et en gommant certains détails trop modernes. Pas de chance, sur cette image de la place rouge de Moscou, il y a à l’avant-plan le Mausolée de Lénine, qui n’a été construit qu’en 1924 !

Capture d’écran de la série de Netflix censée montrer Moscou en 1905
Image actuelle de la place rouge trouvée sur Getty, avec le Mausolée de Lénine, reconnaissable avec sa forme pyramidale rectangulaire

Bien entendu, cette période de l’histoire est très périlleuse à résumer. En effet, la révolution qui a renversé le pouvoir monarchique a mené à l’avènement du communisme, qui lui-même a influencé la montée d’Hitler et a donc eu une influence non négligeable sur une bonne partie de l’histoire européenne du 20e siècle. Le site Russia Beyond a recensé une série d’erreurs historiques qui ne plaisent pas à tout le monde. On note le fait que les historiens parlent de la douma comme d’un « gouvernement élu », alors qu’il s’agit bien d’un parlement. Rappelons que l’un représente le pouvoir exécutif, l’autre le pouvoir législatif. Autre élément scénographique un peu perturbant est la langue des acteurs. La série est tournée en anglais et les scénaristes n’ont pas hésité à nous glisser des « f*ck » et des « sh*t », même lorsque le révolutionnaire bolchévique Ivan Kaliaïev hurle un gros « f*ck le tsar » au moment d’exploser le grand-duc Sergueï avec une bombe artisanale. Ensuite, il termine avec une balle dans la tête. Cet homme, qui a véritablement existé a en réalité… fini pendu. Un détail, mais tout de même !

La princesse Anastasia est-elle toujours vivante ?

Parmi certains des nombreux fantasmes liés à cette famille Romanov, la série en soulève plusieurs, comme l’appétit sexuel insatiable de Grigori Raspoutine ou la survie de la princesse Anastasia au massacre de la famille. Concernant la survie d’Anastasia, si longtemps le doute a plané, le mystère a pris fin récemment. En 1990, les restes des corps des Romanov sont retrouvés enterrés. Les analyses ADN permettent de confirmer qu’il s’agit bien de Nicolas II, son épouse et trois de ses cinq enfants. Il manque de l’ADN mâle sur le corps des enfants (Alexis est donc manquant) et les analyses qui concernent l’âge des ossements ne permet pas de déterminer qui d’Anastasia ou Maria est manquante. Les corps retrouvés sont enfin enterrés dignement, en présence des descendants des Romanov et de Boris Eltsine, en 1998. Enfin, dernier épisode qui met fin à toutes les spéculations, en juillet 2007, deux corps sont retrouvés enfuis dans la terre là où ont mené les recherches. Au bout de quelques mois, les analyses sont formelles, il s’agit de deux membres de la famille Romanov, et il s’agit d’un garçon et d’une fille. Les analyses finales confirment qu’il s’agissait bien du tsarévitch Alexis et de sa sœur Maria. Anastasia avait donc été découverte avec le reste de la famille lors de la première fouille.

Qui sont les descendants des Romanov ?

Comme les découvertes des corps l’ont confirmé, il n’y a aucun survivant direct du dernier tsar Nicolas II de Russie, tous ses enfants ayant été exécutés. Néanmoins, Nicolas II, fils de l’empereur Alexandre III, avait plusieurs frères et sœurs qui ont eu une descendance. Lors de l’enterrement des dépouilles de la famille en 1998, c’est Andreï Andreïvitch de Russie, chef de la maison Holstein-Gottorp-Romanov, qui fut invité à représenter la famille Romanov. Il se dispute aujourd’hui avec sa cousine la grande-duchesse Maria Vladimirovna de Russie le titre de prétendant au trône de Russie. Andreï est le petit-fils de Xenia Alexandrovna, sœur de Nicolas II. Âgé de 92 ans, il est donc le petit-neveu du dernier tsar. Andreï a eu trois épouses, dont il a un fils hériter, Alexis (né en 1953) marié à Zoetta Leisy, qu’il a eu avec sa première femme.

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Nicolas Fontaine

Rédacteur en chef

Nicolas Fontaine a été concepteur-rédacteur et auteur pour de nombreuses marques et médias belges et français. Spécialiste de l'actualité des familles royales, Nicolas a fondé le site Histoires royales dont il est le rédacteur en chef. nicolas@histoiresroyales.fr