Le nizam de Hyderabad a reçu tous les honneurs, tous les titres que l’on puisse imaginer. Mais le qualificatif qui lui fit le plus plaisir fut celui de l’homme le plus riche du monde. Le souverain d’Hyderabad était si riche qu’il a décidé de jeter pour 3 millions de livres sterling en billets, en découvrant des trous causés par des rats qui avaient rongé les billets. À l’époque, la rumeur disait que ce souverain indien dormait au milieu de caisses remplies d’émeraudes et qu’il possédait tellement de perles, qu’il aurait pu recouvrir Piccadilly Circus. Cette semaine, le nizam extravagant du 20e siècle est de nouveau sous les feux des projecteurs, depuis que la Haute Cour britannique a accordé le droit à ses petits-fils d’hériter de sa fortune valant aujourd’hui 35 millions de livres, qui dormait depuis des décennies dans une banque londonienne.
Qui était le 7e nizam de Hyderabad, Asaf Jah VII ?
Mir Osman Ali Khan fut un jour l’homme le plus riche du monde. Né en 1886, il fut le nizam de l’État de Hyderabad. Cet ancien État indien fut intégré au Raj britannique comme État princier en 1798. Cet État princier du centre de l’Inde tenta même de devenir indépendant, au moment où l’Inde a proclamé son indépendance en 1947. Mir Osman Ali Khan fut le dernier souverain de Hyderabad de 1911 à 1948, il portait le titre de nawab et avait été anobli par la Couronne britannique, étant également chevalier grand commandeur de l’ordre de l’Étoile de l’Inde et chevalier grand-croix de l’ordre de l’Empire britannique. Le gouvernement britannique en avait fait Son Altesse exaltée un prédicat exceptionnel réservé aux nizams de Hyderabad. Lorsque l’indépendance de l’Inde fut proclamée, il résista pendant un an, ne voulant pas être annexé. Hyderabad était un territoire grand comme l’Italie et 17 millions de personnes vivaient sous le règne du 7e nizam, qui utilisait le nom de règne d’Asaf Jah VII.
L’homme le plus riche du monde était aussi très pingre
Ce grand fumeur et mâchouiller de feuilles de bétel n’avait plus que des chicots dans sa bouche à la fin de sa vie. D’un radin crasse, il vivait pourtant dans un monde exubérant alors qu’il portait des sandales achetées dans un marché pour quelques roupies. En totale contradiction avec sa pingrerie, il était également un grand philanthrope et a offert une fortune considérable à des bonnes œuvres religieuses, étant un musulman très pieux, ou à des associations qui aidaient au développement de l’éducation. Il pouvait vivre dans de vieux vêtements sales, alors qu’il possédait les plus belles parures, les plus beaux vêtements de satin et le diamant Jacob, une pierre de 185 carats de la taille d’un œuf d’autruche, évalué à l’époque à 50 millions de livres. Il s’était constitué une armée personnelle de 3 000 gardes qu’il avait été chercher en Afrique du Nord. Il employait 12 000 serviteurs dont 38 personnes dont le seul travail était d’allumer et éteindre les chandeliers de son palais, 28 autres personnes s’occupaient d’aller chercher de l’eau potable, alors qu’une poignée de serviteurs étaient chargés de lui récolter des fruits secs.
Malgré sa radinerie, il était aussi très généreux avec les autres
Asaf Jah VII se déplaçait dans l’une de ses 50 Rolls Royce lorsqu’il visitait son peuple. Il buvait son propre whisky en écoutant un orchestre de jazz qui jouait rien que pour lui, lorsqu’il se reposait dans son palais. Sa fortune était composée de 100 millions £ en or en argent et il possédait pour plus de 400 millions £ en bijoux. S’il possédait encore sa fortune aujourd’hui, cela représenterait 50 milliards de livres. Malgré cela, il tricotait lui-même ses chaussettes. Il récupérait les mégots de cigarettes de ses invités pour les fumer jusqu’au bout et il a porté le même fez pendant plus de 35 ans. Vers la fin de sa vie, il mangeait des plats dans lesquels il ajoutait de la poudre d’opium et dormait dans une simple véranda avec sa chèvre.
L’appétit sexuel du nizam était de notoriété publique
Le nizam Asaf Jah VII était également connu pour son grand appétit sexuel. Il avait fait installer des caméras cachées dans les plafonds de son palais et filmait les ébats sexuels de ses invités qu’il fournissait en maitresses. La rumeur dit qu’il possédait la plus grande collection pornographique de l’époque. Il était entouré d’un harem de bégums qui voyageaient avec lui. Lorsqu’il débarqua en Angleterre, en bateau en 1934, il avait pris avec lui sa cour de 300 courtisans et de bégums. Il fut légalement marié à quatre femmes et des dizaines d’enfants des concubines qu’il enfanta. À sa mort, ces deux fils légitimes virent défiler devant eux des centaines de femmes accompagnées de leurs enfants, qui demandaient leur part de l’héritage. Certaines sources parlent de 34 enfants officiels, mais d’autres historiens sont parvenus à dénombrer 149 enfants.
L’héritage disputé d’Asaf Jah VII
Généreux avec ses invités et attentionné, le nizam avait reçu le prince de Galles, futur duc de Windsor, chez lui avec faste. Il avait également participé financièrement aux deux guerres en faisant des dons d’une valeur de 25 millions de livres au gouvernement britannique. Le chouchou de la Couronne jurait une fidélité sans nom au souverain britannique et il offrit un énorme collier de diamants à Elizabeth, lorsqu’elle épousa le prince Philip en 1947. Parmi tous les princes et maharajahs qui étaient plus de 560 à l’époque, il était le préféré de l’Angleterre et il lui rendait bien. Il avait également ouvert un compte dans un banque londonienne sur lequel il avait déposé 1 million de livres. Aujourd’hui, ce compte qui se trouve dans la banque NatWest, vaut 35 millions de livres et il vient d’être décidé par la justice britannique que ses deux petits-fils en étaient officiellement les héritiers, au terme d’une longue bataille juridique.
Malgré son mode de vie exubérant, en contraste total avec la pauvreté de son peuple, il était très apprécié. Sous son règne, son État a connu l’expansion des routes, du chemin de fer, du système postal. Il a exigé la construction d’universités, d’hôpitaux et a développé l’industrie.
Après sa destitution, le nizam devint Rajpramukh de Hyderabad. À sa mort en 1967, son fils aîné, le nawab Azam Jah reçut le titre de courtoisie de prince de Berar. La fortune du nizam fut dilapidée et divisée, chaque descendant réclamant son dû. Asaf Jah VII avait réglé sa succession dynastique avant sa mort, désignant son petit-fils, le fils aîné d’Azam Jah comme son héritier. Ce fut donc son petit-fils Mukarram, de son nom complet Mir Barkat Ali Khan Siddiqi, qui fut désigné comme prétendant au trône de Hyderabad, en tant que 8e nizam. C’est aujourd’hui lui, âgé de 84 ans, et son frère, le prince Muffakhan qui viennent de recevoir l’héritage accordé par le tribunal britannique.