C’est au tour du grand-duché de Luxembourg d’apporter sa réponse concernant la possibilité de voir monter sur le trône un souverain homosexuel et marié. Depuis quelques jours, les différents représentants des cours européennes répondent à ces questions, suite à la réponse sans détour du Premier ministre néerlandais à ce sujet. La Cour grand-ducale a même osé aborder la question de la légitimité des enfants issus d’une union homosexuelle.
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L’héritier du trône luxembourgeois peut-il épouser une personne du même sexe ?
Il y a deux semaines, le Premier ministre Mark Rutte a répondu, dans une lettre formelle, aux questions de parlementaires qui s’interrogeaient sur l’avenir de la monarchie, dans le cas où l’héritière du trône, actuellement la princesse Catharina-Amalia, épousait une femme. «Le gouvernement estime que l’héritier peut aussi épouser une personne du même sexe et ne voit pas d’obstacle à une loi permettant le mariage d’un héritier avec une personne du même sexe», avait répondu le Premier ministre dans sa lettre.
Quelques jours plus tard, la presse belge relayait des propos du Premier ministre Alexander De Croo, qui a lui aussi donné son avis sur la question. «Un prince ou une princesse héritier(e) a les mêmes droits que tous les Belges à cet égard», a répondu le Premier ministre belge.
La semaine dernière, ce fut au tour de la Cour de Suède de répondre à la question. Le maréchal de la Cour, Fredrik Wersäll, a expliqué à Aftonbladet que rien dans la Constitution n’empêchait un mariage entre personne de même sexe au sein de la famille royale et qu’un tel mariage ne viendrait pas modifier l’ordre de succession.
Jusqu’ici, personne n’avait répondu clairement à la question suivante : celle qui concerne la place dans l’ordre de succession d’un enfant issu d’une adoption ou d’une autre méthode de conception. Notons aussi que dans toutes les monarchies européennes, le gouvernement ou le parlement, selon les cas, doit approuver le mariage pour ne pas perdre sa place dans l’ordre de succession. Si la loi accepte donc le mariage, il n’est pas certain que celui-ci passe l’épreuve de l’assentiment.
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Le chef de famille peut décider de la légitimité du mariage de ses héritiers
Cette semaine, c’est au tour de la Cour luxembourgeoise d’apporter sa réponse à la question. Contactée par L’Essentiel, la Cour indique que «tous les mariages au Luxembourg sont soumis à la législation nationale, y compris les mariages de la famille grand-ducale conclus au Luxembourg». Le mariage entre personnes de même sexe est autorisé pleinement au Luxembourg depuis 2015, ainsi que l’adoption par deux parents de même sexe.
La réponse de la Cour grand-ducale n’est pas étonnante, puisqu’elle suit simplement la loi. Un jour, un grand-duc de Luxembourg pourra-t-il être ouvertement gay et marié ? Ce n’est pas si sûr. Si princes et princesses ont légalement le droit d’épouser qui ils souhaitent, ce n’est pas certain que sa place dans l’ordre de succession ne soit pas remise en question. Le mariage sera peut-être validé dans les registres civils, mais il peut être réprouvé par la famille. Dans le cas où le mariage n’est pas consenti par le chef de la famille, le prince ou la princesse concerné perd sa place dans l’ordre de succession.
«Tout mariage au sein de la famille grand-ducale est soumis à l’accord préalable du chef de famille», rappelle la Cour au quotidien luxembourgeois. «Il revient donc au chef de famille de donner son consentement ou non à un mariage entre deux personnes du même sexe».
Enfin, peut-être la plus importante des questions puisqu’elle aborde la question épineuse de la succession et de l’héritage, qui est au cœur même de la notion des monarchies héréditaires, est la question des enfants. Jusqu’à présent aucune des Cours interrogées sur l’éventualité d’avoir un monarque homosexuel marié, n’avait osé parler des enfants.
Là aussi, c’est au pacte de la famille Nassau qu’il faut se référer. La Constitution luxembourgeoise indique à l’article 3 du chapitre 1 que le pays est monarchie héréditaire dont l’ordre de succession est déterminé selon un ensemble de règles se trouvant au sein du pacte de famille.
Le pacte de la famille Nassau, rédigé le 30 juin 1783, a connu plusieurs amendements au fil des époques, pour s’adapter à la situation familiale et à l’évolution des mœurs. Néanmoins, à l’heure actuelle, le pacte de famille ne reconnait pas comme héritier un enfant adopté. Selon la Cour, le pacte de famille exclut aussi qu’un enfant né d’un «don de gamète puisse être considéré comme héritier».
Pour l’heure la question ne se pose pas. Le grand-duc héritier Guillaume, 39 ans, a épousé la princesse Stéphanie en 2012. Ils sont les parents du petit prince Charles, né en 2020. Charles est actuellement deuxième dans l’ordre de succession et n’a qu’un an et demi.