Vers un statut officiel pour le roi des Maoris ?

Ce dimanche 20 août 2023, plusieurs milliers de personnes étaient réunies sous la pluie à Ngāruawāhia, en Nouvelle-Zélande, pour assister au traditionnel Koroneihana, une cérémonie maorie qui honore la culture maorie et son roi Tuheitia. Pour la première fois, le Premier ministre néo-zélandais et d’autres représentants politiques assistaient à la célébration, durant laquelle le leader du parti monarchiste maori a demandé d’accorder un statut officiel au Roi. Le Premier ministre réfléchit à la question.

Lire aussi : Le roi des Maoris invité au couronnement du roi Charles III

Le leader du mouvement monarchiste maori interpelle le Premier ministre lors d’une cérémonie traditionnelle

Chaque année, depuis plus d’un siècle, est organisé le Koroneihana, une cérémonie durant laquelle la culture maorie est mise à l’honneur ainsi que la personne du Roi. Cette année, le Koroneihana a attiré des milliers de personnes, en raison de son caractère exceptionnel. La cérémonie n’avait plus été organisée de manière traditionnelle depuis trois ans, à cause de la crise sanitaire.

Le Koroneihana a lieu au Tūrangawaewae Marae, le siège du Kīngitanga (le mouvement monarchiste maori), situé à Ngāruawāhia, dans la région de Waikato, au nord de la Nouvelle-Zélande. « Cet événement est l’occasion de réfléchir aux questions cruciales de l’année écoulée, notamment la crise du coût de la vie, les inondations de Tamaki Makaurau et les conséquences du cyclone Gabrielle sur la côte Est. Ces défis ont mis en évidence la résilience de nos communautés », explique le chef de cabinet de Kingitanga, Ngira Simmonds, à The Herald. Le roi en profite également pour prononcer son discours annuel et pour informer des changements de postes au sein de son cabinet.

Pour la première fois, le Premier ministre a assisté au Koroneihana au Tūrangawaewae Marae (Photo : capture d’écran vidéo)

Lire aussi : Le roi des Maoris s’envole pour assister aux funérailles d’Elizabeth II à Londres

Le roi Tuheitia n’a pas digéré l’affront vécu à Londres

Cette année, exceptionnellement, Chris Hipkins, Premier ministre néo-zélandais, était présent, ainsi que des représentants de presque tous les partis politiques du pays. Le Premier ministre n’a pas été épargné dans les discours prononcés, notamment critiqué par l’ancien président du parti maori (Te Pāti Māori) qui regrette le manque de considération et la condescendance qu’ont les politiques nationaux envers leur communauté.

Rawiri Waititi, l’un des dirigeants du Te Pāti Māori, a déclaré dans un discours prononcé devant la délégation d’invités qu’il souhaitait que le roi maori « reçoive les “clés du pays” et bénéficie des mêmes droits diplomatiques que le roi Charles reçoit en tant que souverain du Royaume-Uni lors de ses visites en Nouvelle-Zélande », comme le cite le média Stuff. À l’heure actuelle, le roi Tūheitia Pōtatau Te Wherowhero VII, 68 ans, est considéré comme le roi des Maoris par le Kīngitanga et certains partis politiques maoris. Il descend du roi Potatau 1er, un chef de guerre nommé roi des Maoris par un mouvement monarchiste indigène en 1857.

Le roi Tuheitia Paki et son épouse avec le roi Charles III et la reine Camilla lors d’une visite en Nouvelle-Zélande en 2015 (Photo : John Stillwell/PA Wire/ABACAPRESS.COM)

Depuis le premier roi des Maoris, les souverains se succèdent de manière héréditaire même si la transmission n’est pas nécessairement héréditaire. Le nouveau souverain est élu par un conseil formé par des chefs de tribus. Le roi Tuheitia a succédé à sa mère, la reine Te Atairangikaahu, en 2006. Le souverain maori n’a pas de reconnaissance constitutionnelle mais il bénéficie d’une certaine autorité parmi les siens, qui lui vaut aussi une reconnaissance officielle dans certaines occasions. Il est par exemple envoyé pour représenter la Nouvelle-Zélande lors des célébrations royales à l’étranger, notamment dans les petites monarchies coutumières des îles du Pacifique. Il faisait aussi partie des invités de la délégation néo-zélandaise au couronnement du roi Charles III en mai dernier et aux funérailles de la reine Elizabeth II en septembre 2022.

Lire aussi : Le selfie de Jason Momoa avec le roi Tuheitia VII des Maoris fait le buzz

Le Premier ministre néo-zélandais « cherche des conseils » concernant la nécessité d’accorder un statut constitutionnel au roi des Maoris

Le leader du parti maori a souligné que le roi Tuheitia avait subi des mauvais traitements récemment et que la protection de son statut permettrait d’éviter tout autre malentendu. Il faisait ici référence à l’affront vécu par le roi Tuheitia en mai dernier, à Londres. Phil Goff, le haut-commissaire britannique en Nouvelle-Zélande, s’était adressé à la délégation néo-zélandaise qui était en déplacement en Angleterre pour assister au couronnement du roi Charles III. Dans son discours, le haut-commissaire avait déclaré que « personne dans cette pièce n’a pu assister à un couronnement » dans sa vie, oubliant que le roi Tuheitia a lui-même eu droit à une cérémonie de couronnement en 2006. Certaines personnes dans cette pièce avaient assisté à son couronnement et même à celui de sa mère en 1996.

Le roi Tuheitia prononce son discours annuel lors du Koroneihana, ce dimanche 20 août 2023 (Photo : capture d’écran vidéo)

« Je ne pense pas que les Maoris puissent rester silencieux lorsque nous vivons des choses comme nous l’avons vécu cet après-midi », avait déclaré furieux Ngira Simmonds à NRZ après l’incident. Phil Goff avait ensuite présenté ses excuses pour « ne pas avoir suivi le protocole ». Au Morning Report, le Premier ministre Chris Hipkins avait réagi à cet incident « certainement regrettable ».

Après la demande de Waititi d’officialiser le statut du roi des Maoris ce dimanche, le Premier ministre Chris Hipkins a réagi. Selon Stuff, le Premier ministre néo-zélandais a déclaré « qu’il cherchait des conseils pour savoir si le gouvernement pourrait accorder un rôle formel ou constitutionnel au roi Tuheitia ». Plus tôt dans l’année, Waititi avait déjà interpellé les autorités britanniques, demandant s’il était prévu que le roi Charles prononce prochainement des excuses pour les actions coloniales des Britanniques en Nouvelle-Zélande. La Nouvelle-Zélande est un des 14 royaumes du Commonwealth (en plus du Royaume-Uni) qui gardent le souverain britannique comme chef d’État.

Avatar photo
Nicolas Fontaine

Rédacteur en chef

Nicolas Fontaine a été concepteur-rédacteur et auteur pour de nombreuses marques et médias belges et français. Spécialiste de l'actualité des familles royales, Nicolas a fondé le site Histoires royales dont il est le rédacteur en chef. nicolas@histoiresroyales.fr