Le couronnement du roi Charles III et de la reine Camilla du Royaume-Uni

Ce 6 mai 2023, le roi Charles III du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord a ceint la couronne de saint Édouard, à l’abbaye de Westminster, à côté de la reine Camilla coiffée de la couronne de couronnement de la reine Mary. Pour la première fois dans l’histoire, des chefs d’État étrangers et des monarques du monde entier ont assisté à cette cérémonie séculaire qui s’était déroulée pour la dernière fois il y a 70 ans.

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La Procession du Roi : du palais de Buckingham à l’abbaye de Westminster

Le roi Charles III, 74 ans, est monté sur le trône du Royaume-Uni le 8 septembre 2022, au dernier soupir de sa mère, la reine Elizabeth II, décédée à 96 ans au château de Balmoral, en Écosse. Le nouveau roi n’a attendu que huit mois avant d’organiser sa cérémonie de couronnement, une cérémonie principalement religieuse qui symbolise le pouvoir du souverain et confirme sa promesse de dévouement au service de son peuple par la volonté de Dieu.

Le roi Charles III et la reine Camilla quittent le palais de Buckingham une demi-heure avant la cérémonie de couronnement et rejoignent l’abbaye de Westminster (Photo : Niall Carson/PA Wire/ABACAPRESS.COM)

Au cours de cette cérémonie, dont les rituels millénaires se calquent sur des gestes effectués par des rois d’Angleterre et d’Écosse depuis des temps immémoriaux, rien n’est laissé au hasard. Chaque objet a une signification et chaque geste est effectué avec gravité.

La procession quitte le palais de Buckingham et traverse le Mall (Photo : capture d’écran vidéo)

Le roi Charles III et la reine Camilla sont arrivés à la cathédrale de Westminster à bord du carrosse d’État du Jubilé de diamant, qui les a transportés depuis le palais de Buckingham. Le carrosse a traversé le Mall, cette grande artère d’un kilomètre, puis il a tourné à Whitehall avant de s’engager dans Westminster, le quartier historique où siègent les institutions du pays. Le roi Charles portait son manteau d’État sur le dos ayant appartenu à son grand-père, le roi George VI.

Lors de la Procession du Roi (cortège aller), le couple royal voyagera à bord du Carrosse d’État du Jubilé de diamant. Lors de la Procession du couronnement (cortège retour), le couple royal utilisera le Carrosse d’État en or (Image : Histoires Royales)

Le cortège emmenant les souverains jusqu’à l’abbaye de Westminster est appelé la Procession du Roi. La procession s’effectue à bord du carrosse d’État du jubilé de diamant, un carrosse doré comprenant des artéfacts récupérés sur une centaine de sites historiques britanniques. Comme son nom l’indique, ce carrosse a été construit pour le Jubilé de diamant de la reine Elizabeth II en 2012, même si le fabricant avait initialement prévu qu’il serait offert pour les 80 ans de la reine, en 2006. Il a finalement été utilisé pour la première fois à l’occasion de la cérémonie d’ouverture du parlement de 2014.

Le carrosse d’État du jubilé de diamant traverse le Mall (Photo : capture d’écran vidéo)

Le carrosse a été conçu par le fabricant australien W. J. Frecklington en 2010 mais il n’a pu être acheminé jusqu’à Londres qu’au printemps 2014, en raison de problèmes de transport. Ce carrosse de 2,75 tonnes et de 5 mètres de long, tiré par six chevaux, ressemble fortement au carrosse d’État australien, qui lui avait des roues rouges et était légèrement plus bas.

Le carrosse est fabriqué avec des pièces provenant d’une centaine de sites historiques britanniques. Ici, détail de la marqueterie de la porte intérieure, où l’origine de chaque morceau de bois est répertoriée (Photo : Yui Mok/PA Wire/ABACAPRESS.COM)

La marqueterie de la porte intérieure du carrosse est faite de bois provenant de plusieurs sites historiques d’Angleterre, d’Écosse, d’Irlande et d’autres nations du Commonwealth. D’autres détails, comme les poignées, les plafonds, le parquet intérieur mais aussi les banquettes, les cuirs ou les châssis sont en réalité des artéfacts de bâtiments historiques, de monuments, de lieux touristiques ou culturels.

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L’arrivée des membres de la famille royale à l’abbaye de Westminster

L’abbaye de Westminster, construite entre le 13e et le 16e siècle, est le haut lieu de la vie religieuse de Londres. Il s’agit aussi d’une nécropole royale et l’abbaye accueille la plupart des grandes célébrations royales. Déjà 38 cérémonies de couronnement se sont déroulées en ces lieux. Édouard V, au milieu du 15e siècle n’a jamais été couronné, ni Édouard VIII, l’oncle de la reine Elizabeth II, qui a abdiqué en 1936 avant la cérémonie.

Le duc et la duchesse d’Édimbourg arrivent à l’abbaye avec leurs deux enfants, juste avant l’arrivée des souverains (Photo : capture d’écran vidéo)

Pendant le trajet des souverains à bord du carrosse, les membres de la famille royale sont arrivés à l’abbaye de Westminster par ordre de préséance. Le prince Harry et le prince Andrew, deux anciens membres actifs de la famille royale, sont arrivés en même temps que les princesses Beatrice et Eugenie. Les membres de la famille royale travaillant pour la couronne les suivaient : le duc et la duchesse d’Édimbourg avec leurs deux enfants, le duc et la duchesse de Gloucester ainsi que la princesse Anne et son épouse, Sir Timothy Laurence.

L’arrivée des souverains à l’abbaye de Westminster et la traversée de la nef

Une fois les invités et les membres de la famille installés à l’abbaye, le roi Charles III et la reine Camilla ont traversé la nef de l’abbaye, accompagnés par leurs pages, et sur les versets chantés du Psaume 122 : « Je me réjouis lorsqu’on me dit : Allons à la maison de l’Éternel ! ». Ces versets sont chantés sur différents airs depuis le couronnement de Charles 1er en 1626. L’air actuel est celui de Sir Hubert Parry, utilisé depuis le couronnement d’Édouard VII en 1902. On y a aussi ajouté à cette date les exultations :  « Vivat Rex! » (Vive le Roi ! ).

La procession traverse l’abbaye (Photo : capture d’écran vidéo)

Bien que la cérémonie se déroule à l’abbaye de Westminster, c’est l’archevêque de Canterbury qui officie, en raison de la teneur officielle de cette cérémonie d’État, remplaçant alors le doyen de Westminster qui officie habituellement en ces lieux. Le doyen de Westminster, héritier des abbés de Westminster, seconde l’archevêque, lui-même deuxième homme de l’Église d’Angleterre après le souverain.

Le roi et la reine traversent l’abbaye (Photo : capture d’écran vidéo)

La première cérémonie de couronnement d’un roi d’Angleterre, dont certains éléments restent inchangés aujourd’hui, est traditionnellement considérée comme celle du roi Edgar. Le roi Edgar et son épouse, la reine Ælfthryth ont été couronnés lors d’une cérémonie grandiose à Bath, en 973. Edgar est considéré comme le premier « roi d’Angleterre », car il a réuni en un seul royaume tous les différents royaumes sur lesquels régnaient avant lui les « rois des Anglais ».

De nombreux éléments se retrouvent dans la cérémonie actuelle et se trouvaient déjà dès les premiers couronnements, comme le serment, l’onction, l’investiture, la reconnaissance,… Le rituel religieux se base sur une liturgie du Xe siècle, rédigée par saint Dunstan. Elle a subi diverses adaptations au haut Moyen Âge. Guillaume le Conquérant a choisi d’être couronné dans l’abbaye de Westminster le jour de Noël 1066, car il prétendait être le successeur légitime du roi saxon Édouard le Confesseur et il souhaitait recevoir la couronne d’Angleterre près de la tombe d’Edouard qui est située dans l’église de Westminster.

Le prince et la princesse de Galles avec la princesse Charlotte et le prince Louis, à côté du duc et de la duchesse d’Édimbourg (Photo : capture d’écran vidéo)

Les rituels pratiqués sont compilés dans le manuscrit Liber Regalis. Ce manuel a été rédigé vers 1382, en préparation du couronnement d’Anne de Bohême, épouse de Richard II. Le manuscrit reprend le déroulé de tous les couronnements précédents, ce qui permet d’avoir une idée exacte du scénario et la liturgie de ces cérémonies. La liturgie était en latin jusqu’au couronnement de Jacques 1e, en 1603, qui fut la première traduite en anglais. Le manuscrit est conservé à la bibliothèque de l’abbaye de Westminster. 

Le service religieux est principalement basé sur celui célébré en 1953 pour la reine Elizabeth II. Il se divise en six grandes parties : la procession, la communion, l’investiture (avec le couronnement), l’intronisation, la cérémonie de la reine consort, l’Eucharistie.

Les souverains ont quatre pages chacun. La procession suit la Croix du pays Galles, une croix fixée à un bâton, à la valeur inestimable. Cette croix récente avait été commanditée par Charles, lorsqu’il était encore prince de Galles, pour célébrer le centenaire de la création de la division galloise de l’Église d’Angleterre. Le pape François a offert, il y a quelques jours, des morceaux de la véritable Croix du Christ. Les reliques en bois ont été incrustées dans la Croix du pays de Galles. Après le couronnement, les deux morceaux seront offerts à l’Église d’Angleterre du pays de Galles et au diocèse de l’Église catholique du pays de Galles.

La Catholic News Agency a souligné l’importance de ce cadeau « étant donné que beaucoup considèrent les morceaux de la croix parmi les reliques les plus précieuses de toute la chrétienté. Le don du pape est considéré comme un incroyable signe œcuménique de bonne volonté. » On parle d’un geste œcuménique mais aussi diplomatique. L’Église d’Angleterre s’est séparée de l’Église romaine catholique en 1537 lorsqu’en Henri VIII s’est vu refuser son divorce. Ce même Henri VIII avait lutté contre les idées protestantes quelques années plus tôt et s’était même vu offrir le titre de « Défenseur de la Foi » par le pape Léon X, un titre qui figure toujours dans la titulature complète du souverain britannique.

Le roi Charles III au début du service religieux (Photo : Yui Mok/PA Wire/ABACAPRESS.COM)

Depuis quelques années, Charles dit qu’il sera le souverain de toutes les confessions, bien que dans les faits, le souverain est surtout attaché à l’Église d’Angleterre mais aussi protecteur de l’Église d’Écosse. Les deux Églises sont distinctes, celle d’Écosse étant presbytérienne. Malgré la dernière révision plus moderne de la loi sur les règles de succession au trône, être de confession catholique reste l’un des rares critères qui entraîne automatiquement l’exclusion de l’ordre de succession. Cette dernière modification de la loi a permis d’assouplir la sanction, qui autrefois s’appliquait aussi à toute personne mariée à un ou une catholique.

La reine porte une robe d’État rouge carmin. Cette robe est en réalité une longue cape avec traîne. Pour ce couronnement, Charles et Camilla ont décidé de réutiliser d’anciennes robes, contrairement aux couronnements précédents où chaque monarque se faisait confectionner sa propre robe. La robe d’État portée par la reine Camilla a été fabriquée à l’origine pour la reine Elizabeth II en 1953. La robe est faite de velours carmin et n’a nécessité que quelques ajustements. Lors de la procession de sortie, après la cérémonie, ils porteront chacun une autre robe.

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La procession du Roi et de la Reine a lieu juste après, dirigée par le marquis d’Anglesey, le duc de Westminster, le comte de Caledon et le comte de Dundee qui portent les étendards des armes royales de la principauté de Galles. Francis Dymoke portait l’étendard royal. Francis Dymoke est un ancien comptable devenu fermier. La famille Dymoke détient la fonction de « King’s Champion » (Champion du Roi, en français), depuis 34 générations. Au Moyen-Âge, le champion participait au banquet royal et défiait ceux qui doutaient du droit du roi. Il n’y a plus de banquet de couronnement depuis 1821, alors le rôle de Champion du Roi a évolué. Ici, il porte fièrement l’étendard royal. Derrière l’étendard, le roi et la reine marchent jusque dans le « théâtre », la partie centrale devant l’autel.

Lorsque le roi Charles III a traversé la nef en direction du transept, il avait à ses côtés son petit-fils, le prince George de Galles. George, 9 ans, est le fils aîné du prince de Galles et l’héritier présomptif du trône. Il est actuellement 2e dans l’ordre de succession au trône britannique. Le roi Charles III avait aussi pour page Lord Oliver Cholmondeley, Maître Nicholas Barclay et Maître Ralph Tollemache. Le marquis et la marquise de Cholmondeley sont des amis intimes de la famille royale, et en particulier du prince William et de son épouse. Aussi, le marquis assurait la fonction de Lord-grand-chambellan jusqu’à la mort d’Elizabeth II. Le Lord-grand-chambellan est l’un des grands officiers du Royaume-Uni qui s’occupe de l’intendance du palais de Westminster. Nicholas Barclay est le petit-fils de Sarah Troughton, la lord-lieutenant du Wiltshire, qui fut aussi la dame de compagnie de la duchesse de Kent de 1990 à 2000. Elle est une cousine du roi Charles III. Son grand-père maternel était Claude Bowes-Lyon, 14e comte de Strathmore et Kinghorne, un des frères d’Elizabeth Bowes-Lyon, la mère d’Elizabeth II. Ralph Tollemache est le fils du filleul du roi, Edward Tollemache. Edward Tollemache est un banquier de 46 ans, fils et héritier du baron Tollemache.

La reine Camilla a choisi de mettre à l’honneur pour la toute première fois ses propres petits-enfants. Camilla Shand a été mariée de 1973 à 1995 avec Andrew Parker Bowles. De ce mariage sont nés Tom et Laura Parker Bowles. Tom Parker Bowles a été marié de 2005 à 2018 avec Sarah Buys. Le couple a eu deux enfants, Lola et Frederick Parker Bowles, nés en 2007 et 2010. Laura Parker Bowles, connue comme Laura Lopes depuis son mariage en 2006 avec Harry Lopes, est mère d’Eliza Lopes, née en 2008, et des jumeaux Gus et Louis, nés le 30 décembre 2009. Eliza Lopes avait déjà joué un rôle officiel lors d’une cérémonie royale. Eliza était l’une des enfants d’honneur au mariage du prince William et de Catherine Middleton en 2011. Gus et Louis n’avaient encore jamais participé à une cérémonie royale. Le dernier page de la reine Camilla est Arthur Elliot, son petit-neveu. La reine Camilla a un frère, Mark Shand, et une sœur cadette, Annabel Shand, veuve de Simon Elliot. Annabel et Simon sont les parents de Benjamin, Alice et Catherine Elliot. Benjamin “Ben” Elliot est un homme d’affaires et politicien bien connu, haut placé au parti conservateur. Ben Elliot a épousé l’américaine Mary-Clare Winwood en 2011. Ils sont les parents d’Arthur Elliot et Ike Stephen Elliot.

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La liturgie de la cérémonie de couronnement

La liturgie de la cérémonie de couronnement a été écrite spécialement pour l’occasion par Justin Welby, archevêque de Canterbury. Elle reflète la volonté de dévouement du roi Charles. L’archevêque de Canterbury est le deuxième personnage le plus important de l’Église d’Angleterre après le souverain, lui-même Gouverneur suprême de l’Église d’Angleterre.

Le roi et la reine au début de la liturgie (Photo : capture d’écran vidéo)

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Le livret de l’office religieux est intitulé « Appelé à servir » et les textes religieux sont tirés de la Bible du roi Jacques. Une fois tout le monde en place, un enfant du chœur déclame : « Votre Majesté, en tant qu’enfants du Royaume de Dieu, nous vous accueillons au nom du Roi des Rois ». Le Roi lui répond : « En Son nom et à Son exemple, je ne viens pas pour être servi mais pour servir ». Ces mots font référence au moment clé de la cérémonie de couronnement, qui est l’onction du souverain. Le terme « Roi des rois » est un titre donné à Jésus dans la Bible (Apocalypse 19.16). Dans ses commentaires préalables, l’Église d’Angleterre a rappelé que derrière l’apparat de cette fastueuse cérémonie « se cache un autre message : notre roi s’engage, par des prières et des serments, à suivre le Seigneur qu’il sert dans une vie de service aimant dans son rôle de monarque ».

Le roi, dans sa chaise, incline la tête et respecte un moment de silence pour rendre hommage à Dieu. Elizabeth II en avait fait de même en 1953. L’archevêque de Canterbury prend la parole et procède aux salutations. Comme tous les services de communion, celui-ci commence par des salutations sous la forme d’une bénédiction de l’amour, de la grâce et de la présence de Dieu pour tous ceux qui se sont réunis au nom de Dieu. « Bien-aimés, nous sommes réunis pour offrir adoration et louange à Dieu Tout-Puissant ; célébrer la vie de nos nations; prier pour Charles, notre roi; reconnaître et remercier pour sa vie au service de cette nation, des royaumes et du Commonwealth ; et d’être témoin avec joie de son couronnement et de son onction, alors qu’il est mis à part et se consacre au service de son peuple. Consacrons-nous de la même manière, dans le corps, la pensée et l’esprit, à une foi renouvelée, à une espérance joyeuse et à un engagement à nous servir les uns les autres dans l’amour. »

S’en suit un Kyrie eleison particulier. Ce chant en grec, qui signifie « Seigneur, prends pitié », est ici une commande spéciale pour le couronnement au compositeur Paul Mealor. Les quelques paroles ne sont pas prononcées en grec mais en gallois.

La reconnaissance et la présentation de la Bible

Arrive à présent la partie de la reconnaissance. Cette partie est un élément traditionnel de tous les couronnements britanniques. Il est devenu incontournable durant le Moyen-Âge mais il est attesté qu’une cérémonie de reconnaissance avait déjà eu lieu au tout premier couronnement du roi Edgar en 973.

Le roi Charles III se trouve dans le « théâtre », cette scène construite dans le cœur de l’abbaye spécialement pour le couronnement. Les quatre côtés de la scène représentent les quatre coins cardinaux. Le roi est symboliquement présenté aux notables du pays. Le roi est présenté aux quatre côtés et les invités répondent à chaque fois « God Save King Charles » (Que Dieu protège le roi Charles). Habituellement, c’est l’archevêque de Canterbury qui récite quatre fois les paroles de reconnaissance. Pour la première fois, l’archevêque ne posera la question qu’une seule fois. « Je vous présente ici le roi Charles, votre Roi incontestable : C’est pourquoi vous tous qui êtes venus aujourd’hui, pour faire votre hommage et votre service : êtes-vous disposés à faire de même ? ». Les trois autres personnes sont Lady Angiolini, dame de l’ordre du Chardon, Christopher Finney, président de l’Association de la Croix de Victoria et de la Croix de George et la baronne Amos, dame de l’ordre de la Jarretière.

La Bible est ensuite présentée au roi par le modérateur de l’Assemblée générale de l’Église d’Écosse : « Sire, : pour vous garder toujours à l’esprit de la loi et de l’Évangile de Dieu comme règle pour toute la vie et le gouvernement des princes chrétiens, recevez ce livre, la chose la plus précieuse que ce monde offre. Voici la Sagesse, c’est la loi royale, ce sont les oracles animés de Dieu. » Ces paroles ont pour but de rappeler que la parole de Dieu est au-dessus de toutes les lois humaines.

La présentation formelle de la Bible au souverain remonte au couronnement conjoint de Guillaume III et de Marie II en 1689. Pour la toute première fois, en 1953, Elizabeth II avait décidé d’inclure l’Église d’Écosse en faisant intervenir son modérateur. L’Église d’Écosse est totalement indépendante de l’Église d’Angleterre. L’Église d’Écosse est presbytérienne. Dans ses explications de la liturgie, l’archevêque de Canterbury a d’ailleurs rappelé que la participation d’un membre de l’Église d’Écosse est « manière symbolique montrer de la progression et de l’amélioration dans relations œcuméniques ».

Le serment du roi Charles III plus inclusif

Le roi Charles III doit ensuite prêter serment. Un serment est une promesse faite par le monarque. Il a toujours fait partie du rite du couronnement. En 973, la promesse du roi Edgar était de défendre l’église en paix, d’interdire l’extorsion et le crime, et d’être équitable et miséricordieux dans ses jugements. La promesse du roi Edgar est restée pratiquement inchangée pendant trois cents ans, lorsqu’une quatrième clause a été ajoutée. En 1689, le serment a été élargi et reformulé pour le couronnement conjoint de Guillaume et Marie. Ce serment est prescrit par la loi de 1688 sur le serment du couronnement. Le serment étant figé par une loi votée par le Parlement, il n’est pas possible de le modifier sans abroger la loi.

Le prince et la princesse de Galles entourant la princesse Charlotte et le prince Louis de Galles pendant le couronnement (Photo : Yui Mok/PA Wire/ABACPRESS.COM)

Toutefois, Elizabeth II avait montré sa volonté d’inclure toutes les confessions du pays lors de ses actions. Charles III a confirmé cette volonté et souhaite démontrer qu’il sera le roi de toutes les fois. Exceptionnellement, pour la première fois, l’archevêque de Canterbury a accepté qu’on ajoute un petit paragraphe d’introduction au début du serment afin de mentionner l’aspect multiconfessionnel, sans devoir modifier le serment qui suit, figé par la loi.

L’archevêque dit : « Votre Majesté, l’Église établie par la loi, dont vous jurerez de maintenir l’établissement, s’engage à la véritable profession de l’Évangile et, ce faisant, cherchera à favoriser un environnement dans lequel les personnes de toutes confessions et les croyances peuvent vivre librement. Le serment du couronnement existe depuis des siècles et est inscrit dans la loi. Êtes-vous prêt à prêter serment ». Le roi répond : « Je suis d’accord », puis il pose la main sur la Bible pendant que l’archevêque récite le serment.

« Promettrez-vous et jurerez-vous solennellement de gouverner les peuples du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, vos autres royaumes et territoires, à ceux qui vous appartiennent ou à ceux dont vous dépendez, selon leurs lois et coutumes respectives ? » Le Roi répond : « Je promets solennellement de le faire. »

L’archevêque poursuit : « Voulez-vous faire en sorte que la loi et la justice, dans la miséricorde, soient exécutées dans tous vos jugements ? » Le roi confirme. « Voulez-vous, dans la mesure de vos moyens, maintenir les Lois de Dieu et la véritable profession de l’Evangile ? Voulez-vous, dans la mesure de vos moyens, maintenir au Royaume-Uni la religion protestante réformée établie par la loi ? Voulez-vous maintenir et préserver inviolablement l’établissement de l’Église d’Angleterre, ainsi que sa doctrine, son culte, sa discipline et son gouvernement, conformément à la loi établie en Angleterre ? Et conserverez-vous aux évêques et au clergé d’Angleterre, et aux églises qui y sont confiées à leur charge, tous les droits et privilèges qui, selon la loi, leur appartiennent ou leur appartiendront, à eux ou à l’un d’entre eux ? » Le roi répond : « Je promets de faire tout cela. Les choses que j’ai promises ici auparavant, je les accomplirai et les maintiendrai. Que Dieu me soit en aide ».

Dernière question de l’archevêque : « Votre Majesté, êtes-vous disposée à faire, souscrire et déclarer le serment de déclaration d’adhésion statutaire ? » Le roi répond : « Je suis d’accord. Moi, Charles, solennellement et sincèrement en présence de Dieu, je professe, témoigne et déclare que je suis un protestant fidèle, et que je soutiendrai, selon la véritable intention des textes qui assurent la succession protestante au trône de maintenir lesdits textes au meilleur de mes pouvoirs conformément à la loi. » Après un court hymne chanté par la signature du serment, le chœur entonne « Prevent Us, O Lord » de William Byrd.

Cette séquence se termine par la prière du roi. Cette prière a été écrite spécialement pour cette cérémonie. Il s’agit d’une première historique. Jamais encore un souverain n’avait formulé une prière à voix haute de façon aussi claire, au cours d’un couronnement.

« Dieu de compassion et de miséricorde dont le Fils n’a pas été envoyé pour être servi mais pour servir, accorde-moi la grâce de trouver dans ton service la liberté parfaite et dans cette liberté la connaissance de ta vérité. Fais que je sois une bénédiction pour tous tes enfants, de toute foi et de toute conviction, afin qu’ensemble nous découvrions les voies de la douceur et soyons conduits sur les chemins de la paix, par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen. » La prière du roi Charles III inclut à nouveau toutes les convictions.

Après l’interprétation du Gloria in excelsis, l’un des anciens chants de l’église, vient la lecture de la Collect, un type de prière sommaire et thématique. Dans sa Collect, l’archevêque s’adresse au seigneur et l’exhorte : « Regarde avec faveur ton serviteur Charles notre Roi, et accorde-lui de tels dons de sagesse et d’amour que nous et tout ton peuple puissions vivre dans la paix et la prospérité et dans un service aimant L’un à l’autre ».

Lecture du Premier ministre et sermon

Le Premier ministre est invité à lire un passage de la Bible, comme c’est devenu la coutume moderne observée lors d’autres cérémonies d’État, en vertu de sa fonction publique, étant le Premier ministre de la nation dans laquelle le couronnement a lieu.

Le Premier ministre Rishi Sunak a lu les versets 9 à 17 du chapitre 1 de la Lettre de saint Paul aux Colossiens : « Depuis le jour où nous en avons entendu parler, nous ne cessons pas de prier pour vous. Nous demandons à Dieu de vous combler de la pleine connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelle. Ainsi votre conduite sera digne du Seigneur, et capable de lui plaire en toutes choses ; par tout le bien que vous ferez, vous porterez du fruit et vous progresserez dans la vraie connaissance de Dieu. »

Le premier ministre Rishi Sunak lit l’Évangile (Photo : capture d’écran vidéo)

« Vous serez fortifiés en tout par la puissance de sa gloire, qui vous donnera toute persévérance et patience. Dans la joie, vous rendrez grâce à Dieu le Père, qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints, dans la lumière. Nous arrachant au pouvoir des ténèbres, il nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé : en lui nous avons la rédemption, le pardon des péchés. Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né, avant toute créature : en lui, tout fut créé, dans le ciel et sur la terre. Les êtres visibles et invisibles, Puissances, Principautés, Souverainetés, Dominations, tout est créé par lui et pour lui. Il est avant toute chose, et tout subsiste en lui. »

L’archevêque de Cantorbéry a choisi cette lecture car les Colossiens sont la communauté chrétienne de Colosses (qui fait maintenant partie de la Turquie). Colosses a été l’une des premières Églises chrétiennes à être établie après la résurrection de Jésus.

Un psaume Alleluia est chanté. Il s’agit d’une commande à Debbie Wiseman pour le couronnement. Dame Sarah Mullally, doyenne des Chapelles royales, est ensuite en chargée de faire la lecture de l’Évangile (Luc 4:16-21) : « Il se rendit à Nazareth, où il avait été élevé, et, selon sa coutume, il entra dans la synagogue le jour du sabbat. Il se leva pour faire la lecture, et on lui remit le livre du prophète Ésaïe. L’ayant déroulé, il trouva l’endroit où il était écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi, Parce qu’il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres; Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour publier une année de grâce du Seigneur. Ensuite, il roula le livre, le remit au serviteur, et s’assit. Tous ceux qui se trouvaient dans la synagogue avaient les regards fixés sur lui. Alors il commença à leur dire : Aujourd’hui cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, est accomplie. »

La lecture de l’Évangile est suivie par un nouveau chant d’Alleluia, avant que l’archevêque de Canterbury déclame son sermon.

Le roi Charles III se dévêtit et porte le Colodium sindonis

Le service de communion se poursuit. Après le Credo, le chœur chante Veni, Creator Spiritus, l’ancien hymne invoquant le Saint-Esprit. Il suit les serments et les prières qui énoncent et éclairent les exigences uniques de la monarchie. Ce faisant, il reconnaît qu’un tel appel ne peut être accompli qu’avec la force et la grâce de Dieu. Les paroles du Veni Creator sont prononcées en anglais, en gallois, en gaélique écossais et en gaélique irlandais.

La robe du Souverain est retirée et il est assis dans la chaise du couronnement (placée face à l’autel). Les changements de robes durant la cérémonie font partie des éléments rituels qui sont exécutés à chaque couronnement, depuis des siècles. La symbolique des robes ou des tuniques renvoie au changement d’état du souverain, entre le moment où il arrive à l’abbaye et le moment où il en ressort, après la cérémonie.

Le Colobium sindonis est un simple vêtement en lin blanc sans manches. Colobium est un mot latin, qui vient du grec, qui signifie tunique. Sindonis signifie linceul en latin. Lorsque le souverain porte le linceul, il symbolise le fait de se dépouiller de toute vanité du monde et de se tenir nu devant Dieu. Cette robe est portée au début de la cérémonie pour oindre le roi.

Le roi Charles III porte le simble colobium sindonis alors qu’on déplace les écrans pour le cacher (Photo : capture d’écran vidéo)

Le Colobium sindonis était déjà utilisé lors des cérémonies de couronnement des rois d’Angleterre du Moyen-Âge. Son origine remonterait au couronnement d’Édouard le Confesseur en 1043. Bien entendu, les tuniques et les robes utilisées à cette époque n’ont pas résisté au temps et en particulier aux guerres civiles. Les tuniques utilisées à présent sont des confections modernes et spécialement dessinées pour correspondre à la morphologie de chaque souverain.

Hosam Naoum, archevêque anglican de Jérusalem tend à ce moment l’ampoule contenant l’huile sacrée. L’archevêque de Canterbury proclame une dernière bénédiction et invoque le Seigneur : « Tu es béni, Dieu souverain, qui soutiens de ta grâce tous ceux qui sont appelés à ton service. Tes prophètes d’anciens prêtres et rois ont été oints pour servir en ton nom et dans la plénitude des temps, ton fils unique a été oint par le Saint-Esprit pour être le Christ, le Sauveur et le Serviteur de tous. Par la puissance du même Esprit, bénis et sanctifie cette huile, afin qu’elle soit pour ton serviteur Charles un signe de joie et d’allégresse ; afin que, comme roi, il connaisse l’abondance de ta grâce et la puissance de ta miséricorde, et que nous devenions un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple pour ta possession. Béni soit Dieu, notre force et notre salut, maintenant et pour toujours. Amen.»

À l’abri des regards, l’archevêque va oindre le Souverain d’huile sainte sur les mains, la poitrine et la tête. C’est la partie la plus solennelle du service du couronnement, car par l’onction, le monarque devient le serviteur. Ses actions sont dirigées par la volonté de Dieu. La tradition de l’onction remonte à l’Ancien Testament, qui décrit l’onction du roi Salomon par le prêtre Sadoq. L’huile a été mélangée et bénie dans l’église du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Il y a quelques semaines, le patriarche Théophile III de Jérusalem a consacré le Saint-Chrême fabriqué à base d’huile d’oliviers du Jardin des oliviers.

Pendant ce temps, le chœur chante l’hymne du prêtre Sadoq, dont les paroles (qui se trouvent dans le premier Livre des Rois) ont été chantées à chaque couronnement depuis le roi Edgar en 973. Depuis le couronnement de George II en 1727, les paroles ont été chantées sur une musique de Haendel.

Un écran est placé pour cacher le roi pendant qu’il reçoit l’onction (Photo : capture d’écran vidéo)

Pour protéger le souverain du regard du public durant ce moment sacré, un écran est placé devant le roi. Cette tenture brodée a été réalisée pour ce couronnement. Sur le tissu représentant un arbre, on découvre des petites feuilles dans lesquels sont brodés les noms de tous les pays du Commonwealth. Le roi Charles III, en plus d’être le souverain et chef d’État de 15 pays indépendants, est aussi le chef du Commonwealth des Nations, une organisation intergouvernementale qui réunit 56 pays, principalement des anciennes colonies de l’Empire britannique.

La tenture a été conçue par l’iconographe Aidan Hart et a été confectionnée par la Royal School of Needlework. Certaines broderies sont faites à la main et d’autres à la machine. La tenture a été offerte par la City of London Corporation et les City Livery Companies, deux corporations d’artisans de Londres. Deux anges surmontent l’arbre et les racines sont frappées du monogramme du chiffre du roi « CRIII ». Sous l’arbre on retrouve la phrase que Jésus-Christ aurait dit à Julienne de Norwich : « Tout finira bien. Toutes choses, quelles qu’elles soient, finiront bien. » (en anglais : All shall be well, and all shall be well, and all manner of thing shall be well)

Une fois le Roi et l’archevêque protégés derrière l’écran, l’archevêque verse l’huile dans une cuillère et oint le roi aux mains, à la poitrine et à la tête en prononçant à voix basse : « Que vos mains soient ointes d’huile sainte. Que votre poitrine soit ointe d’huile sainte. Que votre tête soit ointe d’huile sainte, comme les rois, les prêtres et les prophètes ont été oints. Et comme Salomon a été oint roi par le prêtre Sadoq et le prophète Nathan. Ainsi, soyez oint, béni et consacré Roi sur les peuples que l’Éternel, votre Dieu, vous a donné pour diriger et gouverner. Au Nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Amen. »

Une fois l’onction terminée, l’écran est retiré et le roi se met à genoux face à l’autel, alors que l’archevêque prononce une dernière bénédiction, en s’adressant au Seigneur.

Le roi Charles III endosse la Supertunica

Une fois oint, le roi est alors investi de la Supertunica. La Supertunica est un manteau de soie dorée à manches longues qui a été confectionné pour le couronnement du roi George V en 1911 et a été porté par le roi George VI en mai 1937 et par la reine Elizabeth en 1953. La Supertunica est placée sur le Colobium sindonis.

La Supertunica actuelle a été créée pour le couronnement de George V en 1911 et a été portée par George VI et Elizabeth II. Le Manteau impérial vient se porter par-dessus (Photo : Victoria Jones/PA Photos/ABACAPRESS.COM)

La Supertunica s’inspire visuellement des vêtements de l’Église primitive et de l’Empire byzantin. Elle est ornée des symboles nationaux et une étole est aussi posée sur les épaules. Le souverain est revêtu de la tunique dorée après avoir reçu l’onction. Ce vêtement de confection assez récente évoque les habits sacerdotaux, rappelant la nature divine de la royauté. Rappelons que le roi du Royaume-Uni est aussi le gouverneur suprême de l’Église d’Angleterre et que la cérémonie de couronnement est de nature religieuse, principalement. La Supertunica a été confectionnée par le tailleur londonien Wilkinson & Son.

Le Manteau impérial (Photo : Victoria Jones/PA Photos/ABACAPRESS.COM)

Le Manteau impérial est ensuite porté par-dessus la Supertunica. Il est doré et rappelle lui aussi les vêtements sacerdotaux. Le manteau, également connu sous le nom de robe pallium ou dalmatique, a été fabriqué pour le couronnement de George IV en 1821. Bien que sa conception date du 19e siècle, le manteau est inspiré des vêtements des portraits des monarques Tudor et Stuart, qui eux-mêmes portaient des vêtements inspirés des couronnements médiévaux. Avant George IV, des manteaux dorés équivalents et assez ressemblants avaient été confectionnés pour chaque souverain. Le drap d’or est brodé de roses, de chardons, de trèfles, de couronnes, d’aigles et de fleurs de lys. Le fermoir en or a une forme d’un aigle, que l’on peut également voir sur l’écran d’onction nouvellement créé, avec l’ampoule qui contient l’huile chrismale.

La présentation des regalia

La remise des regalia est faite par des pairs de la Chambre des Lords et des évêques principaux de l’Église anglicane. Certaines personnes ont une fonction héréditaire et depuis des siècles, certains Lords ont pour fonction de présenter tel ou tel regalia lors des couronnements.

Les premiers regalia sont les éperons, qui sont ramenés de l’autel doyen par le doyen de Westminster et remis au Lord Great Chamberlain. Le roi reconnaît les éperons et l’archevêque de Conterbury déclame : « Recevez ces éperons, symboles d’honneur et de courage. Puissiez-vous être un courageux défenseur des personnes dans le besoin. ». Les éperons sont ensuite reconduits à l’autel. Les éperons ont été fabriqués en 1661 pour le roi Charles II. Ces éperons en or, en cuir et en velours du 17e siècle symbolisent la chevalerie. Ils ont été modifiés en 1820 pour le roi George IV. L’utilisation d’éperons pour le couronnement remonte à celui de Richard Cœur de Lion en 1189.

Lors de l’échange des épées, le Psaume 71 du psautier grec de la Septante est chanté en grec. Il s’agit ici d’un hommage au défunt prince consort Philip, duc d’Édimbourg, né prince Philippe de Grèce et de Danemark. Le Lord Président du Conseil prend l’épée dans son fourreau et la donne à l’archevêque qui la dresse devant l’autel. L’archevêque dit une prière, puis la rend au Lord Président du Conseil qui l’amène au roi. L’épée est placée dans la main droite du roi. L’archevêque déclame, entre autres : « Puisse-t-elle être pour vous, et pour tous ceux qui sont témoins de ces choses, un signe et un symbole non de jugement, mais de justice ; pas de force, mais de miséricorde ». Le roi range ensuite l’épée à sa ceinture. Les épées, dans ce contexte, ne sont pas utilisées comme des armes violentes mais sont un symbole de défense.

Le roi Charles reconnaît les regalia et tient l’épée (Photo : capture d’écran vidéo)

Viennent ensuite les armilles qui sont retirées de l’autel et données à Lord Kamall par le doyen de Westminster. Lord Kamall les présente au roi, qui les reconnaît, pendant que l’archevêque déclare : « Recevez les bracelets de sincérité et de sagesse, gage de la protection de Dieu qui vous embrasse de tous côtés ». Les armilles sont des bracelets en or champlevé et émail. Le champlevé est une technique de gravure qui consiste à creuser des cavités dans l’épaisseur du métal et ensuite de remplir ces cavités d’émail tout en laissant un dessin qui est formé par les cloisons. Les armilles, qui sont doublées de velours, symbolisent la force militaire datant de l’époque chevaleresque. Elles ont été fabriquées au 17e siècle et sont utilisées depuis le couronnement de Charles II.

Le prince de Galles apporte la robe royale au roi Charles III

Le prince William, en tant qu’héritier du trône, intervient à ce moment de la cérémonie. Le prince de Galles entre dans le « théâtre » et aide le roi à enfiler le manteau, avec l’aide de la baronne Merron et des évêques.

Le prince de Galles remet l’étole royale à son père (Photo : capture d’écran vidéo)

En même temps, l’évêque de Durham donne au roi l’étole royale. « Recevez cette robe. Que le Seigneur vous revête de la robe de justice et des vêtements du salut », déclame l’archevêque au même moment. Ces paroles font écho aux mots du prophète Isaïe (chapitre 61) dans l’Ancien Testament.

Le regalia suivant est l’orbe. Le doyen de Westminster prend l’orbe sur l’autel, le donne à l’archevêque du diocèse anglican d’Armagh,en Irlande du Nord, qui apporte l’orbe à l’archevêque. L’archevêque place ensuite l’orbe crucigère dans la main droite du roi et déclame : « Recevez cet Orbe, placé sous la Croix, et souvenez-vous toujours que les royaumes de ce monde sont devenus les royaumes de notre Seigneur et de son Christ. »

Le roi tient l’orbe (Photo : capture d’écran vidéo)

L’orbe crucigère est certainement l’un des regalia les plus connus avec les épées et les couronnes. Ce joyau représente le pouvoir spirituel du souverain. De nombreuses monarchies utilisent ce regalia en forme de sphère surmonté d’une croix, rappelant le monde chrétien, lors de ses rituels royaux. Cet orbe du 17e siècle est divisé en trois sections par trois bandes de bijoux et pierres précieuses. Les trois sections symbolisent les trois seuls continents connus à l’époque médiévale.

Après avoir remis l’orbe sur l’autel, le doyen prend la bague et la remet à Lord Patel, qui la présente au roi. Pendant que le roi reconnait l’anneau, l’archevêque déclare : « Recevez cet anneau, symbole de la dignité royale et signe de l’alliance jurée aujourd’hui entre Dieu et le roi, le roi et le peuple ». De tout temps, les anneaux sont des symboles de promesse et d’engagement. Ils signifient une alliance et un accord, intemporel, que ce soit lors d’un mariage ou lors d’autres engagements.

Cette bague est composée d’un saphir avec une croix formée par des rubis, le tout serti de diamant. « Symbole de la dignité royale », explique Buckingham, « l’anneau a été fabriqué pour le couronnement du roi Guillaume IV en 1831, et tous les souverains depuis le roi Édouard VII l’ont utilisé lors de leurs couronnements ».

Après avoir remis la bague sur l’autel, Lord Indarjit Singh de Wimbledon prend le gant et le montre au roi. « Recevez ce gant. Puissiez-vous détenir l’autorité avec douceur et grâce, ne vous fiant pas à votre propre pouvoir mais à la miséricorde de Dieu qui vous a choisi », déclare l’archevêque. Le roi enfile ensuite le gant à sa main droite.

Le gant porté par le roi Charles III lors de la cérémonie de couronnement (Photo : Victoria Jones/PA Photos/ABACAPRESS.COM)

L’archevêque anglican du pays de Galles et le primat d’Écosse s’emparent respectivement du sceptre et du Bâton de l’Équité et de la Miséricorde, qui sont remis dans la main droite et la main gauche du roi. « Recevez le sceptre royal, l’enseigne du pouvoir royal et de la justice et le bâton d’équité et de miséricorde, symbole d’alliance et de paix. Que l’Esprit du Seigneur qui a oint Jésus lors de son baptême, vous oigne ainsi aujourd’hui, afin que vous puissiez exercer l’autorité avec sagesse, et diriger vos conseils avec grâce ; que par votre service et votre ministère envers tout votre peuple, la justice et la miséricorde soient visibles sur toute la terre : par le même Jésus-Christ notre Seigneur. Amen. »

Le sceptre avec croix représente le pouvoir temporel du souverain et sa bonne gouvernance, composé d’un bâton en or, surmonté d’un cœur en émail dans lequel est incrusté le diamant Cullinan I. Ce sceptre a été fabriqué pour le couronnement de Charles II mais le diamant n’a été ajouté qu’en 1901.  Le sceptre avec la colombe, appelé « Bâton de l’Équité et de la Miséricorde », est reconnaissable avec sa colombe. Il symbolise le rôle spirituel du souverain. La colombe a les ailes déployées, représentant le Saint-Esprit. Ce sceptre a aussi été créé au 17e siècle lors de la restauration de la monarchie par le bijoutier Robert Vyner.

Le roi Charles III porte la couronne de saint Édouard

Ce 6 mai était la seule et unique occasion pour le roi Charles III de ceindre la couronne de saint Édouard. Ce chef-d’œuvre de joaillerie, d’une masse d’or dépassant les 2 kilos, n’est porté qu’une seule fois au cours d’un règne, et ce depuis Charles II. La couronne de saint Édouard est l’héritière symbolique de la couronne conçue pour Édouard le Confesseur, dernier roi anglo-saxon de la dynastie de Wessex. Il l’aurait portée le jour de Noël 1065, puis elle aurait été portée pour le couronnement de Guillaume le Conquérant, premier roi anglais normand, le 25 décembre 1066 à l’abbaye de Westminster. Elle a ensuite été utilisée lors des cérémonies de couronnement de tous les rois d’Angleterre jusqu’à Henri III en 1216.

La couronne de saint Edouard déposée à l’abbaye de Westminster (Photo : Jack Hill/The Times/News Lincensing/ABACAPRESS.COM)

Comme le reste des joyaux de la Couronne, la couronne originale a été détruite par Oliver Cromwell, puis refabriquée lors de la restauration de la monarchie afin d’en faire usage pour le couronnement de Charles II en 1661. Elle sera ensuite de nouveau utilisée lors des couronnements des souverains suivants. La couronne a été commandée à l’orfèvre royal, Robert Vyner, en 1661 par Charles II. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une réplique exacte de la couronne médiévale, elle suit la description faite de la couronne originale. Elle comprend quatre croix pattées, quatre fleurs de lys et deux arches. Elle est composée d’une monture en or massif sertie de rubis, améthystes, saphirs, grenats, topazes et tourmalines. La couronne a un bonnet de velours avec une bande d’hermine.

Les monarques ont toujours été couronnés lors de l’Eucharistie ou de la Sainte Communion. Ce n’est que pour le couronnement du roi catholique Jacques II, en 1685, que le service de communion a été omis.

Le doyen de Westminster apporte la couronne de saint Édouard à l’archevêque, qui récite la prière de bénédiction. « Roi des rois et Seigneur des seigneurs, bénis, nous t’en supplions, cette couronne, et sanctifie ainsi ton serviteur Charles sur la tête duquel tu la places aujourd’hui en signe de majesté royale, afin qu’il soit couronné de ta faveur gracieuse et rempli de grâce abondante et de toutes les vertus princières; par Jésus-Christ notre Seigneur, qui avec toi et le Saint-Esprit vit et règne, suprême sur toutes choses, un seul Dieu, monde sans fin. Amen. »

Après avoir prononcé ces paroles, l’archevêque pose la couronne sur la tête du roi Charles III. « God Save the King ! », clame l’archevêque, ce à quoi toute l’assemblée répond : « God Save the King ! ». Ces acclamations ont lieu depuis le couronnement de Guillaume III en 1689. La bénédiction est la même que celle écrite pour le couronnement d’Elizabeth II en 1953.

Le roi Charles III avec la couronne de saint Édouard assis sur le trône et tenant le sceptre et le bâton (Photo : capture d’écran vidéo)

Au moment où la couronne est posée sur la tête du roi les cloches de l’abbaye sonnent pendant deux minutes. Des coups de canon sont tirés à la tour de Londres et dans diverses places fortifiés du Royaume-Uni et des territoires britanniques d’outre-mer, y compris sur les navires en mer.

Pour conclure la partie du couronnement, différents représentants religieux prononcent une courte bénédiction. L’archevêque de Canterbury commence, suivi par l’archevêque orthodoxe grec de Thyatire et de Grande-Bretagne, qui est le primat de l’Église orthodoxe grec au Royaume-Uni. Vient la bénédiction du modérateur des Églises libres, puis le secrétaire général des Churches Together, une organisation œcuménique des Églises chrétiennes d’Angleterre. Enfin, avant de redonner la parole à l’archevêque de Canterbury, c’est Vincent Nicholas, cardinal de l’Église catholique et archevêque du diocèse catholique de Westminster, qui a prononcé sa bénédiction. La bénédiction se termine par un hymne chanté (Psaumes 61) mis en musique par Thomas Weelkes.

L’intronisation et les hommages

Avant de passer au couronnement de la reine Camilla. Il faut encore procéder à l’intronisation et aux hommages. Le roi s’avance vers le trône avec sa couronne sur la tête. La chaise de couronnement est le trône en chêne fabriqué par le roi anglais Edouard 1er. Lorsqu’il a envahi l’Écosse, Édouard 1er s’est emparé de la pierre de Scone, qu’il a ramenée en Angleterre et l’a confiée à l’abbé de Westminster. Il a ensuite fait fabriquer un trône en bois pour enfermer cette pierre. Les rois d’Écosse se tenaient debout sur la pierre lors de la cérémonie.

On estime que le roi Kenneth 1e fut le premier à utiliser la pierre pour son couronnement en 847 et il est avéré que les rois suivants, au cours du même siècle l’ont utilisée. Le roi Jean Balliol d’Écosse est le dernier roi écossais à avoir prêté serment debout sur la pierre de Scone, en 1292, avant que le roi d’Angleterre s’en empare. Cette pierre en grès serait même citée au chapitre 28, verset 18 de la Genèse, décrite alors comme une pierre ayant servi d’oreiller à Jacob lorsqu’il était à Béthel. Selon la légende, comme l’écrit le site de l’abbaye de Westminster, ce serait les fils de Jacob qui auraient transporté cette pierre en Egypte. Plus tard, Gathelus, ancêtre des Scots, a été marié en Égypte à Scota, la fille du pharaon. La pierre aurait été ramenée en Espagne, puis en Irlande. La pierre a été rendue à l’Écosse en 1996 et est habituellement exposée au château d’Edimbourg. Il y a quelques jours, elle a fait le voyage jusqu’à Londres pour réintégrer le trône le temps de la cérémonie de couronnement.

« Tenez fermement, et tenez bon, désormais ce siège de la dignité royale, qui est le vôtre par l’autorité de Dieu Tout-Puissant. Puisse ce même Dieu, dont le trône dure à jamais, affermir votre trône dans la justice, afin qu’il demeure ferme à jamais .» Ces paroles prononcées par l’archevêque de Canterbury sont basées sur les premiers textes de couronnement du roi Edgar en 973. Sa signification est celle de la stabilité et de la constance.

Viennent ensuite les hommages au roi, assis dans son trône avec la couronne de saint Édouard sur la tête. Les hommages sont des signes d’allégeances. Lors des précédents couronnements, les Lords et les nobles qui détenaient un titre de pair héréditaire prêtaient tour à tour allégeance et hommage au souverain, dans l’ordre de préséance, d’où la longueur de la cérémonie.

Le premier à porter allégeance est l’archevêque de Canterbury. Symboliquement, en étant le second de l’Église, son allégeance vaut pour tous les évêques. Chaque nouveau prêtre qui sera ordonné prête cette même allégeance au travers celle proclamée par l’archevêque.

Le deuxième hommage est celui du sang royal. Il s’agit de l’allégeance de l’héritier du trône. Le prince de Galles est seul duc royal qui prête serment en 2023 contrairement aux précédentes cérémonies. Le prince William, duc de Cornouailles, titre réservé à l’héritier du trône, s’agenouille et dit : « Moi, William, prince de Galles, je vous promets ma loyauté. Foi et vérité je vous porterai, en tant que lige de la vie et de l’intégrité physique. Que Dieu me vienne en aide. » Le prince William prononce ces paroles en plaçant ses mains dans celles du roi. Un homme lige est une personne qui a une obligation envers un monarque.

La dernière allégeance est celle du peuple. L’archevêque prend la parole pour exhorter le peuple à rendre ses hommages. « J’appelle toutes les personnes de bonne volonté du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, et des autres Royaumes et Territoires à rendre hommage, de cœur et de voix, à leur Roi incontestable, défenseur de tous. » Toute l’assemblée de l’abbaye mais aussi tous les Britanniques chez eux répondent : « Je jure que je prêterai une véritable allégeance à Votre Majesté, ainsi qu’à vos héritiers et successeurs conformément à la loi. Que Dieu me vienne en aide ». Il s’agit de la toute première fois que la population est appelée à se joindre à ce moment de la cérémonie, la rendant plus inclusive et populaire. Après ces paroles, les « vive le roi » fusent. Autrefois, ce dernier hommage était réservé aux pairs.

Avant de passer à la dernière partie de la cérémonie, le couronnement de la reine Camilla, on entend un court hymne, sur un texte qui provient de 1 Rois 2.2. Il s’agit des derniers mots adressés au roi Salomon par son père, le roi David : « Sois fort et montre ta valeur : garde les commandements du Seigneur ton Dieu et marche dans ses voies. »

La reine Camilla ceint la couronne de couronnement de la reine Mary

Le couronnement de l’épouse d’un souverain suit un processus légèrement différent de celui du roi. Ce couronnement confère à l’épouse l’honneur et la position de servir aux côtés du roi. La dernière cérémonie de ce genre remonte à 1937, lorsque la reine Elizabeth a été couronnée aux côtés de George VI. Il n’existe pas d’équivalent pour les époux masculins, c’est pourquoi le prince consort Philip n’avait pas été couronné lors du couronnement de la reine Elizabeth II.

De la même manière que le roi, la reine est ointe par l’archevêque. Cependant, cette onction a lieu sans écran pour démontrer la nature différente de l’onction d’un époux par rapport à un souverain régnant. La différence de symbolique est que l’onction de la reine est donnée à la permission du souverain.

L’archevêque de Canterbury pose la couronne sur la tête de la reine Camilla (Photo : capture d’écran vidéo)

La reine est ointe sur le front pendant que l’archevêque déclare : « Que votre tête soit ointe d’huile sainte ». Puis il s’adresse au Seigneur : « Dieu Tout-Puissant, la fontaine de toute bonté ; entends aujourd’hui notre prière pour ta servante Camilla,
qu’en ton nom, et avec toute dévotion, nous consacrons notre reine. Renforcez-la dans la foi et dans l’amour, défendez-la de tous côtés et guidez-la dans la vérité et la paix ; par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.»

Plusieurs regalia sont aussi présentés à la reine Camilla. D’abord l’anneau, apporté par le gardien de Joyaux de la Couronne. « Recevez cet anneau, symbole de la dignité royale et signe de l’alliance jurée en ce jour. » L’anneau est un gros rubis dans une monture en or. Cette imposante bague a été fabriquée pour le couronnement du roi Guillaume IV et de la reine Adélaïde en 1831.

Les objets royaux sont présentés à la reine Camilla (Photo : capture d’écran vidéo)

L’anneau est remis sur l’autel, où le doyen de Westminster s’empare de la couronne et la remet à l’archevêque de Canterbury qui déclare : « Que ta servante Camilla, qui porte cette couronne, soit remplie de ta grâce abondante et de toutes les vertus princières. Règne dans son cœur, ô Roi d’amour, afin que, certaine de ta protection, elle soit couronnée de votre gracieuse faveur ; par Jésus-Christ notre Seigneur. »

Habituellement, les reines font fabriquer leur propre couronne de couronnement. Au vu de l’époque, la reine Camilla a préféré réutiliser une précédente couronne, celle fabriquée pour la reine Mary, arrière-grand-mère du roi Charles III, avec quelques modifications. Quatre des huit arches ont été enlevées de cette couronne portée par la reine Mary, née Mary de Teck, lors du couronnement de son époux en 1911. La partie inférieure représente une bande aux motifs de végétaux. Des fleurs de lys et des croix pattées soutiennent les arches. La structure est faite en argent, recouverte d’une couche d’or.

La reine Mary avec sa couronne commandée spécialement pour le couronnement du roi George V en 1911, dans sa version avec huit arches (Photo : Alamy/ABACAPRESS.COM)

Lors du couronnement de 1911, la couronne créée par le joaillier Garrard & Co., présentait l’un des diamants le plus connus au monde, le Koh-i-Nor. D’autres diamants célèbres, comme le Cullinan III et le Cullinan IV étaient montés sur la couronne le jour du couronnement. La reine Camilla a décidé de porter la couronne de la reine Mary avec les diamants Cullinan III, IV et V afin de « rendre notamment hommage à Sa Majesté la reine Elizabeth II », précise Buckingham. Les trois diamants Cullinan en question faisaient partie de la collection personnelle de bijoux de la reine Elizabeth II. Les Cullinan III et IV étaient déjà portés par Mary lors du couronnement de son époux en 1911, alors que le Cullinan V était le diamant principal porté sur cette même couronne lors du couronnement de son fils en 1937.

La couronne de la reine Mary est elle-même inspirée de la couronne de la reine Alexandra, portée au couronnement du roi Edouard VII en 1902. Il était d’usage que les reines consorts fassent fabriquer une nouvelle couronne à cette occasion. La reine Camilla a décidé de ne pas faire fabriquer de couronne, ce qui n’était plus arrivé depuis le 18e siècle, lorsque la reine Caroline, épouse du roi George II, avait choisi de porter la couronne de Marie de Modène.

Les derniers regalia présentés à la reine sont le sceptre et le bâton. La reine Camilla a elle aussi droit à son sceptre, fabriqué par Robert Vyner pour Marie de Modène, lors du couronnement de son époux, Jacques II, en 1685. Il est incrusté de cristaux de roche. On lui présente également un bâton en ivoire qui utilise aussi le symbole de la colombe (aux ailes fermées) qui représente l’équité et la miséricorde.

La reine Camilla est ensuite intronisée. Le roi et la reine, parés de leurs joyaux et couronnes, sont à présent unis et consacrés à leur service à la nation. Pendant ce moment de gravité, retentit un hymne de Lloyd-Webber dont les paroles sont tirées du Psaume 98.

Arrive le moment de l’offertoire avec une prière sur le pain et le vin qui est une traduction d’une prière latine ancestrale qui se trouve dans le Liber Regalis. La prière eucharistique qui suit commence par les paroles traditionnelles qui sont reprises dans de nombreuses Églises chrétiennes, et sont suivies par un Sanctus créé pour l’occasion par Roxanna Panufnik. L’eucharistie continue avec la deuxième section qui rappelle les paroles de Jésus lors de la Dernière Cène.

L’archevêque appelle ensuite le monde entier à réciter le Notre Père, peu importe sa langue. Pendant la communion, comme le veut la tradition, un Agnus Dei est chanté. Cette version de Tarik O’Regan est une commande spéciale pour le couronnement.

Le service se termine par la prière après l’Eucharistie puis l’interprétation de plusieurs hymnes. Le premier est Sung Amen de Gibbons, puis l’hymne de couronnement de George III composé par Boyce en 1761, sur un texte du Psaume 21. Enfin, retentit le Te Deum de couronnement de Sir William Walton. Ce Te Deum a été composé pour le couronnement de la reine Elizabeth II.

Pendant le Te Deum, le roi Charles et la reine Camilla s’installent dans la chapelle Saint-Édouard derrière le maître-autel. Ici, on leur remet de nouvelles robes avant de quitter l’abbaye. Le roi Charles III enlève également la couronne de Saint-Édouard et porte à la place la Couronne impériale d’État. Cette couronne d’État a été fabriquée pour le couronnement du roi George VI en 1937, en se basant sur un modèle conçu pour la reine Victoria en 1838. C’est cette couronne qui sera utilisée chaque année par le roi lorsqu’il procédera à la cérémonie d’ouverture du parlement.

Le roi Charles III quitte l’abbaye en procession (Photo : capture d’écran vidéo)

La procession de sortie

L’hymne national britannique « God Save the King » retentit. Pendant la procession de sortie, deux morceaux sont joués à l’orgue. Le premier est La Marche n°4 de Pomp and Circumstance par Edward Elgar, arrangé par Iain Farrington. Le deuxième est La Marche des oiseaux par Hubert Parry, arrangé par John Rutter.

Procession de sortie de l’abbaye de Westminster (Photo : capture d’écran vidéo)

À la fin de la procession, avant de quitter l’abbaye, le roi reçoit les salutations des dirigeants et des représentants des différentes communautés religieuses (juives, hindoues, sikhs, musulmanes, bouddhistes). Les représentants prononcent en chœur : « Votre Majesté, en tant que voisins dans la foi, nous reconnaissons la valeur du service public. Nous nous unissons aux personnes de toutes confessions et croyances dans l’action de grâce et à votre service pour le bien commun. »

Le roi Charles III reçoit les salutations des représentants des différentes confessions en quittant l’abbaye (Photo : capture d’écran vidéo)

Le roi salue alors les gouverneurs généraux puis rejoint le Gold Sate Coach qui le ramènera avec la reine Camilla jusqu’au palais de Buckingham. Le Carrosse d’État en or est utilisé pour chaque couronnement depuis celui de George IV en 1821. Il a été commandé en 1760 et a été conçu dans les ateliers de Samuel Butler. Il est exposé au public dans le musée des Écuries royales du palais de Buckingham. Outre les couronnements, il a aussi longtemps servi pour transporter les souverains lors des cérémonies annuelles de l’ouverture parlementaire. Le Carrosse d’État australien et le Carrosse d’État du Jubilé de diamant sont plus confortables, équipés de suspension et d’accessoires électroniques. Le Carrosse en or pèse près de 7 tonnes et mesure plus de 7,3 mètres, tiré par huit chevaux.

Le Gold State Coach (Carrosse d’État en or) attend le couple royal devant l’abbaye (Photo : capture d’écran vidéo)

Le carrosse avait été utilisé la dernière fois pour les festivités du Jubilé de platine de la reine Elizabeth II, en juin 2022. En raison de l’inconfort du carrosse et de l’âge avancé de la souveraine, décédée trois mois plus tard à 96 ans, le carrosse avait défilé vide dans les rues de Londres.

La reine Elizabeth II a utilisé le Carrosse d’État en or à l’occasion de son couronnement en 1953. Elle l’a aussi utilisé pour son Jubilé d’argent, en 1977 et son Jubilé d’Or. Le carrosse a été commandé par le roi George III en 1760. Sa construction s’est achevée en 1762, soit il y a tout juste 260 ans. À partir de George IV, le fils de George III, tous les monarques britanniques l’ont utilisé à l’occasion de leur couronnement.

Les panneaux latéraux sont l’œuvre de Giovanni Battista Cipriani. Sur le toit du carrosse on retrouve trois chérubins qui représentent les trois nations du Royaume-Uni (l’Angleterre, l’Écosse et l’Irlande du Nord). À l’avant et à l’arrière de la voiture trônent quatre tritons, symboles du pouvoir impérial. Bien que magistral, il est bien connu que ce carrosse est le plus inconfortable de tous les carrosses royaux, Elizabeth II elle-même ayant déclaré que son trajet en carrosse était le pire souvenir de sa journée de couronnement en 1953, à 27 ans.

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Nicolas Fontaine

Rédacteur en chef

Nicolas Fontaine a été concepteur-rédacteur et auteur pour de nombreuses marques et médias belges et français. Spécialiste de l'actualité des familles royales, Nicolas a fondé le site Histoires royales dont il est le rédacteur en chef. nicolas@histoiresroyales.fr