Georges 1e de Grèce, deuxième roi élu de Grèce après quatre siècles d’occupation ottomane, a connu l’un des plus longs règnes pour un monarque européen de l’époque moderne. Son règne débuta le 30 mars 1863, lorsqu’il fut appelé à remplacer le précédent roi renversé, Othon 1e. Son règne s’acheva en 1913, à quelques jours de son 50e anniversaire de règne, assassiné à Thessalonique. Georges 1e est également connu pour être le grand-père du prince Philip, duc d’Édimbourg et par conséquent, il est l’ancêtre en ligne agnatique de tous les descendants de la reine Elizabeth II.
Lire aussi : Sophie Chotek : l’épouse de l’archiduc François-Ferdinand dont l’assassinat déclencha la Première Guerre mondiale
Qui était Georges 1e de Grèce ?
Georges 1er est né Guillaume de Danemark, le 24 décembre 1845. Le prince Guillaume était le 3e enfant du roi Christian IX et de la reine Louise de Danemark. Notons qu’à la naissance de Guillaume, son père n’est pas encore roi mais promis à le devenir. Christian IX, qui succéda à Frédéric VII n’était pas son fils mais un cousin éloigné appartenant à la branche cadette de Schleswig-Holstein-Sonderbourg-Glücksbourg. Frédéric VII n’ayant pas d’enfants, son père lui avait désigné Christian comme successeur.
En 1863, le roi Othon 1e de Grèce, trop autoritaire est renversé. Ce prince bavarois avait été élu pour devenir le premier roi de Grèce, alors que Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha, initialement élu prince souverain déclina l’invitation. Othon 1e monta sur le trône en 1833, alors qu’il était encore mineur. Après 30 ans de règne, sans descendance et avec pour successeur son frère, Léopold de Bavière, le caractère absolutiste du roi n’arrangeant rien, il fut renversé par les révolutionnaires. Rapidement le parlement vote pour élire un nouveau prince européen sur le trône grec. Le prince Guillaume de Danemark est élu le 30 mars 1863, il n’est âgé que de 17 ans.
À l’instar des autres monarques européens de cette époque, ils abandonnent le caractère absolutiste et deviennent des rois bourgeois, qui règnent pour le peuple. En ce sens, Guillaume de Danemark, qui choisit le nom de Georges Ie pour régner, ne sera pas roi de Grèce mais roi des Hellènes. Également, à partir de cette date, la famille royale de Danemark continua à considérer les descendants de Georges 1e comme des princes de Grèce. C’est la raison pour laquelle, tous les membres de la famille royale grecque (y compris actuellement) sont princes et princesses de Grèce et de Danemark à la fois.
En 1867, Georges 1e épouse la grande-duchesse Olga Constantinovna de Russie, petite-fille du tsar Nicolas 1e. Ensemble, ils auront 8 enfants. Leur nombreuse descendance contracta des mariages stratégiques avec des princes et princesses européennes de haut rang.
Lire aussi : Michel 1e : le premier tsar de la dynastie Romanov
L’ascension du diadoque Constantin
Depuis Othon 1e, les Grecs rêvent d’un monarque et de dirigeants qui réussiront à rendre à la Grèce toute sa splendeur. La Grande Idée est le terme qui désigne ce mouvement national qui avait pour idée principale de réunir tous les Grecs dans un seul et même pays et de faire de Constantinople, leur capitale. La Grèce est donc en pleine mouvance expansionniste. Le roi Georges 1e est très jeune et inexpérimenté lorsqu’il monte sur le trône. Mais il apprendra bien vite, réussissant à conquérir de nombreux territoires (îles Ioniennes, Thessalie, Crète), à coups de guerres et de batailles.
La plus belle victoire sous le règne de Georges 1e est certainement celle de l’annexion de la Macédoine à la Grèce. Cette victoire, il la doit à son fils, le diadoque (titre donné au prince héritier) Constantin. En 1912, Nicolas 1e de Monténégro déclare la guerre à l’Empire ottoman. Cette déclaration de guerre bouleverse de nombreux pays alliés et ennemis dans la région, provoquant la Première guerre des Balkans. La Grèce, pour sa part, cherche à s’étendre vers le nord. C’est le prince héritier Constantin en personne qui est chargé de commander l’armée sur le front du nord-est, avec pour but d’assiéger Thessalonique.
Après plusieurs jours de bataille, Constantin arrive à Thessalonique, où il demande au commandant turc qui contrôlait la ville de se rendre. Après négociations fort bien menées par le diadoque, le commandant s’avoue vaincu et remet son épée, reconnaissant sa défaite.
Thessalonique, capitale de la Macédoine redevient grecque. Georges 1e, extrêmement fier de son fils, le nomme gouverneur de cette province, en guise de remerciement pour sa conquête militaire.
Lire aussi : Victor-Emmanuel II : 1e roi d’Italie, dernier roi de Sardaigne
L’assassinat de Georges 1e à Thessalonique
En novembre 1912, le roi Georges 1e, accompagné du Premier ministre, rend visite à son fils héritier à Thessalonique. Celui-ci accueille ses invités de marque comme un grand prince, fier de son fief qu’il a dûment mérité.
Le roi Georges 1e a déjà 67 ans et quasiment 50 ans de règne derrière lui. Il se sent satisfait du travail accompli et très fatigué. Par chance, il constate la popularité de son fils, qui venait d’accomplir une conquête qui ravissait les Grecs partisans de la Grande idée. De plus, Constantin avait épousé Sophie de Prusse, fille de l’empereur Frédéric III et petite-fille (par sa mère) de la reine Victoria du Royaume-Uni. Constantin avait tout pour devenir un grand roi…
Georges 1e, qui était à Thessalonique avec toute sa famille, en mars 1913, avait pour projet d’abdiquer, préférant laisser sa place à son fils, alors qu’il se sentait de moins ne moins vigoureux. Le 13 mars, il déjeune avec 3 de ses fils. Durant ce déjeuner, il leur fait part de son intention d’abdiquer et explique vouloir l’annoncer au mois d’octobre, alors que devaient avoir lieu les célébrations de son jubilé pour ses 50 ans de règne.
Après le déjeuner, le roi Georges 1e veut faire une petite promenade digestive dans les rues de la ville. La cour grecque n’avait rien du prestige des autres cours européennes. Le roi Georges et son épouse vivaient relativement simplement, et leur vie à Athènes leur permettait même de prendre l’air dans la ville sans être importunés. Le roi ayant donc l’habitude de se promener avec très peu de sécurité autour de lui, fit de même à Thessalonique.
Ce jour-là, le roi Georges 1e croisa la route de Aléxandros Schinás, un anarchiste qui l’attendait au coin d’une rue. Aléxandros Schinás tira un coup de revolver en direction du roi. Touché, le roi s’effondre et est conduit de toute urgence à l’hôpital. Malheureusement, Georges 1e mourut avant d’arriver à l’hôpital.
Pour ne pas attiser la haine des Grecs envers Thessalonique, majoritairement peuplée de Slaves, Aléxandros Schinás est présenté comme un anarchiste ivrogne, préférant ne pas trop insister sur les motifs politiques potentiels de ce régicide. Aléxandros Schinás sera interrogé et torturé pendant 6 semaines jusqu’à mort s’en suive. Pour étouffer les tortures, la version officielle dit qu’il s’est défenestré.
Le diadoque Constantin monte sur le trône. Il devient Constantin 1e, premier monarque grec à être né sur le territoire et à parler la langue. La suite de l’histoire monarchique grecque ne sera pas de tout repos. Après seulement 4 ans de règne, à l’issue de la Première guerre mondiale, Constantin 1e est contraint d’abdiquer en faveur de son deuxième fils, Alexandre 1e, et part en exil.
Alexandre 1e mourra à 27 ans, en 1920, suite à une morsure de singe qui s’est infectée. Constantin 1e retrouve son trône pour 1 an et 9 mois supplémentaires. En 1922, il est contraint d’abdiquer une seconde fois, cette fois-ci en faveur de son fils aîné, Georges II, suite à la défaite de la Grèce dans la guerre greco-turque. Constantin mourra quelques mois plus tard en exil, en Italie. Pour sa part, Georges II abdiquera une première fois au bout d’un an et demi. En tout, Georges II trois règnes.
Lire aussi : Le 24 février 1848 : l’abdication de Louis-Philippe pour sauver sa dynastie