Cette semaine, la Gardienne de la Couronne de Roumanie assure un voyage diplomatique important en Espagne. Margareta de Roumanie et le prince consort sont à Madrid pour célébrer le 142e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre les deux pays, mais aussi dans le cadre de la présidence actuelle de l’Espagne au Conseil de l’Union européenne. Ce lundi 25 septembre 2023, Sa Majesté Margareta a prononcé un discours fort, soulignant la nécessité de l’adhésion de la Moldavie à l’Union européenne, lors d’une réunion au Real Instituto Elcano.
Lire aussi : Le voyage diplomatique qui honore les liens de parenté entre les familles royales d’Espagne et de Roumanie
La Gardienne de la Couronne de Roumanie débute ses visites officielles en Espagne
Le 1er juillet 2023, l’Espagne a succédé à la Suède à la présidence du Conseil de l’Union européenne. Ce voyage en Espagne permet à Margareta de Roumanie de s’adresser aux instances européennes actuellement aux commandes de l’Europe. Arrivée dimanche à Madrid, la Gardienne de la Couronne a effectué ses premières visites officielles dès lundi. Le 25 septembre, Margareta et son époux Radu étaient les invités du Centre satellitaire de l’Union européenne, situé dans la ville de Torrejón de Ardoz.
Margareta et Radu de Roumanie ont participé à une présentation approfondie de l’activité du Centre satellitaire de l’Union européenne SatCen (CSUE), dont le directeur est l’ambassadeur roumain Sorin Ducaru. Lors de cette visite du siège l’agence européenne, le couple royal a notamment rencontré des employés roumains.
Lire aussi : La princesse Sofia plongée dans le folklore moldave et à la découverte de l’ancienne ville d’Orhei
Margareta de Roumanie s’exprime au laboratoire d’idées Real Instituto Elcano
La deuxième visite de la journée était hautement plus politique et sensible. La fille aînée du roi Michel 1er était invitée à s’exprimer au Real Instituto Elcano. Ce think tank a été fondé en 2001. Le laboratoire d’idées a invité Margareta à prononcer un discours sur un sujet qu’elle maîtrise à la perfection, la Moldavie et son incidence sur la sécurité européenne. L’institut mène lui-même des recherches sur les questions étrangères et de sécurité.
Lire aussi : La princesse Sofia de Roumanie accueillie par les autorités moldaves à Chisinau
Dans son discours, la Gardienne de la Couronne a rappelé le contexte actuel de la guerre en Ukraine, conflit qui touche de près la Roumanie, mais qui peut sembler éloigné pour les Espagnols. « En effet, nos pays sont différents, et nous avons parfois des points de vue différents, mais notre diversité est notre force et, en fait, l’essence de notre Union », a déclaré Margareta en comparant la Roumanie à l’Espagne. « Le Kremlin ne nous a jamais pris au sérieux et a toujours supposé que nous serions divisés et faibles. Eh bien, nous avons continué à lui prouver le contraire au cours des deux dernières années ».
« Ma tâche aujourd’hui est d’attirer votre attention sur l’Est de notre continent et de vous demander de réfléchir aux dangers potentiels d’une escalade de l’agression actuelle lancée par la Russie contre l’Ukraine. Je voudrais ajouter à l’Ukraine un autre pays où l’Europe doit également prendre position si elle veut assurer la sécurité du continent : la République de Moldavie ».
Un discours engagé en faveur de la Moldavie
Margareta de Roumanie a souligné que l’Europe soutient l’Ukraine, « non seulement parce que cela est moralement juste et juridiquement justifié, mais aussi parce que nous savons qu’une victoire de l’Ukraine est essentielle pour la sécurité de tout notre continent ». La situation d’instabilité actuelle est telle que la Finlande et la Suède ont d’ailleurs décidé de rejoindre l’OTAN. Mais un autre pays, la Moldavie, subi des pressions de la Russie, bien avant l’invasion de l’Ukraine. « En effet, la Moldavie a été l’un des premiers territoires de l’ex-Union soviétique à subir les techniques de déstabilisation de Moscou, désormais familières à chacun d’entre nous. »
Lire aussi : Margareta de Roumanie soutient l’adhésion de la Moldavie à l’Union européenne
« La Moldavie a été soumise à ces pressions et bien plus encore. Elle a survécu, mais elle est restée relativement pauvre et très vulnérable. Et juste au moment où elle élisait un dirigeant et un gouvernement pro-occidentaux déterminés à éliminer la corruption et à consolider les institutions démocratiques, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a placé la Moldavie dans une situation extrêmement dangereuse. Le lien entre la guerre en Ukraine et la situation en Moldavie est évident aux yeux de tous et perdure. »
Margareta de Roumanie, engagée depuis longtemps aux côtés de la Moldavie, a des contacts fréquents avec Maia Sandu, l’actuelle présidente. Celle-ci s’est exprimée la semaine dernière à l’Assemblée générale des Nations Unies à New York, rappelant alors au monde ses ambitions mais aussi la lutte contre la déstabilisation que subit son pays. La Gardienne de la Couronne a aussi profité de l’occasion pour démentir la tentative de récupération de la Moldavie par la Roumanie. Les deux pays roumanophones, qui ne formaient autrefois qu’un seul territoire, sont aujourd’hui indépendants et le seul objectif de la Roumanie est d’aider les Moldaves à maintenir leur indépendance.
Lire aussi : Le roi Willem-Alexander rencontre la présidente moldave qui présente ses aspirations européennes aux Pays-Bas
« Les crises nous choisissent. Anticipons, pour une fois, la prochaine crise »
Même si Sa Majesté accueille avec satisfaction la décision d’accorder le statut de pays candidat à l’adhésion à l’Union européenne, elle doit souligner le caractère urgent de cette candidature. « Les Moldaves sont probablement l’un des plus ardents partisans de l’Europe. Et la population est de taille modeste – à peine plus grande que Barcelone et seulement les deux tiers de celle de Madrid – de sorte que le processus d’intégration ainsi que le prix à payer pour cela restent modestes », ajoute-t-elle pour contrer l’argument de l’écart de richesse.
« En outre, comme le montre amplement l’exemple tragique de l’Ukraine, l’alternative consistant à ne pas saisir l’opportunité de l’intégration européenne signifie un effort d’intégration beaucoup plus coûteux et désespéré à un stade ultérieur. Lorsque la guerre en Ukraine prendra fin, l’Ukraine aura besoin de garanties de sécurité et de vastes fonds de reconstruction économique, et ni l’un ni l’autre ne produiront les résultats nécessaires si la Moldavie n’est pas incluse dans l’équation », a mis en garde la cheffe de la famille royale de Roumanie.
« De plus, nos frontières orientales ne seront pas paisibles tant que ces deux pays ne pourront pas vivre en paix. Et, comme nous l’avons tous découvert par notre propre expérience, ces nations ne trouveront la paix que si elles font partie de notre famille. C’est aussi clair que cela. Je sais que nous sommes confrontés à de nombreuses autres priorités aujourd’hui et qu’elles requièrent toutes notre attention. » La Gardienne de la Couronne a conclu son discours par cette mise en garde : « Je sais aussi tout ce que l’Espagne a fait pour consolider la sécurité européenne. Pourtant, au risque d’énoncer une évidence, nous ne choisissons généralement pas les crises ; les crises nous choisissent. Anticipons, pour une fois, la prochaine crise. En faisant tout notre possible pour que la Moldavie reste entière et libre ».
