5 erreurs dans la biographie de Harry et Meghan : Finding Freedom

Finding Freedom était le livre de cet été, dont la sortie était tant attendue outre-Manche. Cette biographie sur le prince Harry et Meghan Markle est l’œuvre de deux auteurs, Omid Scobie et Carolyn Durand, qui n’ont pas travaillé directement avec le duc et la duchesse de Sussex mais dont la sortie du livre a néanmoins été approuvée. Le livre est censé retracer la vie des Sussex depuis l’intégration de Meghan au sein de la famille royale, jusqu’à leur volonté de quitter leurs fonctions royales. Malheureusement, ce livre au parti pris évident, comprend également des inexactitudes ou des approximations qui décrédibilisent les propos et jouent en défaveur des Sussex.

Pourquoi Finding Freedom est un livre au parti pris, intéressant uniquement pour ses anecdotes mais dont la crédibilité est à remettre en question (Photo : Seuil)

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1. La première phrase du livre est erronée !

Finding Freedom, traduit sobrement en français en Libres, est publié chez le très sérieux éditeur HarperCollins (en version originale et Seuil en français). Pourtant, un peu de fact-checking aurait permis aux auteurs et à l’éditeur de ne pas perdre en crédibilité. Omid Scobie et Carolyn Durand sont des auteurs/journalistes fans des Sussex, qui n’ont pas décroché d’interview avec les intéressés mais ont écrit leur livre sur base de révélations faites par des proches. Il s’agit également d’une biographie autorisée, puisque malgré le manque de collaboration de la part du prince Harry et de Meghan, ceux-ci ne se sont pas opposés à la sortie du livre.

D’ailleurs, le livre n’a qu’un seul but, justifier la « prise de liberté » des Sussex. Si la volonté est louable (car effectivement le couple ne méritait pas les virulentes attaques médiatiques), on ne peut que regretter certaines approximations. Pourtant, en interview, les auteurs ont affirmé que tout avait été vérifié et contre-vérifié.

Ça commence mal dès l’introduction. Le livre s’ouvre avec une citation attribuée à l’auteur américain Ralph Waldo Emerson : « N’allez pas là où le chemin peut mener. Allez là où il n’y a pas de chemin et laissez une trace. »

Cette belle citation, que l’on retrouve fréquemment sur les réseaux sociaux est souvent attribuée à Ralph Waldo Emerson, mais aussi à Robert Frost ou George Bernard Shaw. Malheureusement, il n’existe aucune trace écrite de cette citation par le poète américain du 19e siècle Ralph Waldo Emerson. Il s’agit donc d’une attribution hasardeuse. Par contre, elle est officiellement attribuée (notamment par l’Oxford Dictionary) à l’auteure Muriel Strode. Depuis 1882, elle formule cette pensée de différentes manières dans divers essais et ouvrages. La citation exacte apparait dans un texte écrit en 1903.

La citation d’introduction du livre est attribuée à tort à Ralph Waldo Emerson et non à Muriel Strode comme l’indiquent pourtant les études réalisées à ce sujet (Photos : Domaine public)

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2. Les Sussex auraient pu travailler pour la famille royale et gagner leur vie en même temps

Une grande partie du livre tente de démontrer pourquoi, Meghan, une femme indépendante et ambitieuse, s’est très vite retrouvée coincée au sein d’une « entreprise » rouillée et cadenassée par des traditions. Une des volontés de Meghan et du prince Harry était de voler de leurs propres ailes, eux-mêmes ayant écrit qu’ils voulaient être « indépendants financièrement », comme on peut le lire dans le communiqué foudroyant qui annonçait leur désir de prendre du recul par rapport à la famille royale.

Bien que leur marge de manœuvre aurait été limitée et que leurs faits et gestes auraient été très contrôlés, il y a un point légal qui a souvent été oublié dans les commentaires concernant le retrait des Sussex. Ce point n’a pas non plus été mentionné dans le livre Finding Freedom. Contrairement à d’autres monarchies, les membres de la famille royale britannique ne reçoivent pas dotations ad nominem. Des subsides de l’État servent à faire fonctionner la monarchie, mais c’est la famille royale qui (grâce aux propriétés de la reine et du prince de Galles) s’autofinance en grande partie. Par conséquent, il existe aussi une certaine souplesse quant à la possibilité de travailler à son compte tout en étant membre de la famille royale.

La princesse Beatrice et la princesse Eugenie travaillent pour des entreprises privées. Le prince Michael de Kent possède plusieurs sociétés, et lui non plus d’ailleurs, n’a pas été épargné par les critiques par le passé. Il est vrai, certes, que ces personnes ont ceci de différent, qu’elles ne travaillent pas à temps plein pour la famille, et qu’elles n’ont pas de titres ducaux royaux, comme c’est le cas des Sussex. Sans travail, elles n’auraient donc pas d’argent. Mais il existe un précédent, pour le troisième fils de la Reine, qui aurait très bien pu s’appliquer aux Sussex. Une règle a été mise au point par le Lord Chamberlain Lord Luce en 2001, afin de permettre au comte et à la comtesse de Wessex de combiner à la fois leurs activités professionnelles et leurs activités en tant que membres de la famille royale de premier plan.

La règle du Chamberlain Lord Luce de 2001, mise au point pour permettre au prince Edward et à son épouse de travailler, aurait été proposée aux Sussex mais aucune mention n’est faite dans le livre (Photos : WikiCommons)

Bien que cette règle soit un peu tombée aux oubliettes, car le comte et la comtesse de Wessex ont fini par abandonner leurs activités privées pour travailler à temps plein pour la famille royale, elle n’a jamais été radiée. D’ailleurs, aucune loi n’interdit les membres de la famille royale de travailler, tant que les limites sont claires et que leur statut ne les avantage pas dans leur vie professionnelle civile. La famille royale aurait très bien pu remettre les « Luce Guidelines » à l’ordre du jour ou en élaborer des nouvelles, sur base des anciennes de 2001.

Il est dommage que dans un livre qui se veut être une étude complète autour du processus qui a poussé les Sussex à partir, il n’est pas mentionné que ce sont les Sussex eux-mêmes qui auraient refusé cet entre-deux. D’autant plus que la très bien informée Marlene A. Eilers Koenig, dont la critique du livre nous a aidés à rédiger cet article, affirme que les Luce Guidelines ont bien été proposées aux Sussex.

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3. Des inexactitudes et imprécisions… encore et encore !

Un ensemble d’imprécisions rend le livre questionnable sur sa fiabilité. L’experte Marlene A. Eilers Koenig en a relevé plusieurs. Ceci prouve qu’il aurait suffi d’une relecture externe, par des personnes ayant une meilleure connaissance historique du sujet, pour accorder une crédibilité aux propos qui tentent de transformer en roman l’histoire du duc et de la duchesse de Sussex.

La date de mariage

« Le couple s’est fréquenté pendant sept ans avant que Meghan, 30 ans, et Trevor, 34 ans, ne se marient le 10 septembre 2011, lors d’une cérémonie romantique sur une plage en Jamaïque », peut-on lire dans le livre Finding Freedom, qui mentionne le premier mariage de Meghan Markle, qui a fini par un divorce en 2013.

Contrairement à ce qui est écrit dans le livre, Meghan et Trevor Engelson ne se sont pas mariés en septembre 2011. Ils se sont mariés civilement et officiellement le 16 août 2011 à Los Angeles. Un mois plus tard, ils se sont effectivement rendus en Jamaïque pour fêter le mariage. Wikipedia indique la date correcte du mariage (celle qui figure sur l’acte de divorce de Meghan et Trevor) mais se trompe sur le lieu, indiquant la Jamaïque. Plus tard dans le livre on peut lire cette phrase : « … les photos ont été prises lors de son mariage en Jamaïque avec Trevor en 2013 ». Cette fois-ci les auteurs parlent d’un mariage en 2013. Faute d’inattention ?

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Le consentement de la Reine pour le mariage

Le livre rappelle que le prince Harry a dû obtenir le consentement de sa grand-mère, la reine Elizabeth, pour épouser Meghan. Pour prouver une fois de plus que les traditions ancestrales de la famille royale sont désuètes, les auteurs expliquent que la loi britannique du Royal Marriages Act date de 1772. Celle-ci obligerait les 6 premiers membres dans l’ordre de succession au trône britannique à demander le consentement au souverain.

Cette affirmation est à peu près juste. En réalité c’est la récente révision de la Loi de succession (Crown Act) de 2013, qui impose le consentement des 6 premières personnes dans l’ordre de succession au trône. La loi considère que les 6 premières personnes ont des probabilités d’accéder au trône et par conséquent, il est préférable d’étudier au préalable qui souhaite rejoindre la famille. Le Royal Marriages Act de 1772, mentionné dans le livre, instaure effectivement cette volonté de demander la permission au souverain, mais elle ne limite aucunement cette règle à certains membres de la famille. Par le passé, des petits-enfants, des cousins et des membres plus éloignés de la famille ont perdu leurs droits en ne respectant pas cette loi. Aujourd’hui, elle est limitée aux 6 premiers seulement.

Notons que le Succession to the Crown Act 2013 écrit noir sur blanc que cette nouvelle loi abroge le Royal Marriages Act de 1772. Votée en 2013, la nouvelle loi est entrée en vigueur en 2015, Harry et Meghan se sont mariés en 2018. Tous les mariages « royaux », ayant eu lieu avant mars 2015, comme ceux du prince William, du prince Charles ou même des membres plus éloignés de la famille comme Edward Lascelles (62e dans l’ordre de succession aujourd’hui) ou Juliet Nicolson (dans les environs des 400e dans l’ordre de succession) ont bien nécessité le consentement de la Reine.

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4. Le titre vendeur

Pourquoi avoir écrit ce livre ? Outre l’aspect financier, bien entendu… Ce point rejoint le suivant. Qui est réellement derrière ce livre ? Cet ouvrage ressemble à un plaidoyer, à une énorme justification qui permettrait de pardonner au duc et la duchesse de Sussex leur volonté de s’éloigner de la famille royale.

Là encore, le parti pris de titre ce livre Finding Freedom (“Trouver la liberté”, si on le traduit littéralement), adapté simplement en Libres, en français, laisse supposer que la distance prise par les Sussex, leur permet de respirer hors du carcan de la famille. La distance physique et géographique ainsi que l’absence d’engagements officiels pour la famille, donnent du leste au prince Harry et à son épouse, c’est vrai. Néanmoins, peut-on réellement parler de liberté ? La liberté financière, comme nous l’avons démontré plus haut, ils auraient pu l’avoir. La liberté totale, ils auraient pu également l’avoir en claquant définitivement la porte et en acceptant de devenir de simples civils. Or, durant les négociations avec Buckingham, il a été clairement rapporté que le but était de leur offrir le plus de libertés possibles sans pour autant les destituer de leurs titres.

Ils font toujours partie de la famille royale. Harry est toujours officiellement S.A.R. le prince Henry du Royaume-Uni de Grande-Bretagne. Ils possèdent toujours leurs titres ducaux de Sussex mais n’en feront plus usage lors de leurs activités commerciales.

Quant à la liberté médiatique, ce qui semble être un point important du livre, tous les experts et commentateurs se mettent d’accord pour dire que quiconque cherche la paix médiatique, doit à tout prix éviter de vivre aux États-Unis. Bien que la presse britannique soit virulente et que les tabloïds harcèlent les membres de la famille royale, aux États-Unis, les journalistes et paparrazzis ont tous les droits (ou presque). La notion de vie privée est différente. Mises à part l’interdiction de prendre des photos sur une propriété privée, Meghan et Harry auront du mal à poursuivre les photographes qui les traqueront en rue.

Enfin, le prince Harry et Meghan mènent une campagne contradictoire. Ils cherchent à se distancer de la famille royale afin de mener leur propre vie, plus discrète. Pourtant, il est évident qu’ils joueront de leur notoriété (acquise par leur position royale) pour mener à bien leurs activités caritatives ou commerciales. N’ayant pas pour objectif de retomber dans l’anonymat, qui serait la seule option pour être totalement libres, peut-on réellement parler d’une liberté ?

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Omid Scobie, l’un des auteurs du livre s’exprime sur la sortie de Finding Freedom

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5. La collaboration avec le duc et la duchesse de Sussex

Le dernier point est la communication trouble autour du livre, qui empêche réellement de savoir à quelle point les Sussex sont impliqués dans le projet. Lors de l’annonce de la sortie du livre, Harry et Meghan ont publié un communiqué précisant : « Le duc et la duchesse de Sussex n’ont pas été interrogés et n’ont pas contribué à Finding Freedom. »

Néanmoins, il s’agit d’une biographie autorisée, ce qui veut dire que les Sussex ont donné leur accord pour la publication. Les deux auteurs ont toujours dit ne pas avoir collaboré avec le couple pour l’écriture du livre. Ils se sont basés sur les récits et les informations exclusives de sources bien placées et proches du couple.

Pourtant, il y a quelques jours, Omid Scobie a finalement avoué dans la presse avoir été en contact avec Harry et Meghan. Les Sussex auraient été interrogés pour certaines clarifications « quand ce fut nécessaire ». « Dans de nombreux cas, nous avons accordé l’anonymat aux sources afin d’avoir la liberté de fournir des citations directes sans que leurs noms ne soient attribués », précisait l’auteur, expliquant qu’il s’agissait de collaborateurs, d’employés du palais et d’amis du couple.

Plusieurs autres sources, qui elles n’ont visiblement pas été interrogées pour écrire le livre reprochent que l’on ne présente qu’une seule version des choses. C’est l’angle choisi par les auteurs qui peut déranger. Il y a une véritable tentative de victimiser les Sussex. Il aurait été possible de fournir un livre sur le même sujet, sans pour autant créer cette impression d’engrenage infernal où chaque protagoniste semble jouer un rôle de mauvais.

Il est d’autant plus étonnant qu’Omid Scobie, qui se décrit comme un fan de la famille royale britannique, et comme un expert des monarchies, ait choisi d’écrire un livre dont on se doutait que l’issue ne ferait que tendre les relations entre les Sussex et le reste de la famille.

Pour finir sur une note positive, le livre, que vous pouvez acheter ici, fournit tout de même une multitude d’anecdotes (que l’on peut supposer correctes). Ces anecdotes permettent de découvrir les coulisses de la famille royale. Il ne s’agit très certainement pas d’un livre historique (le livre ne comprend pas d’index bibliographique ni mentions de sources).

Sources : Royal Book News, BBC, Libres (éd. Le Seuil)

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Nicolas Fontaine

Rédacteur en chef

Nicolas Fontaine a été concepteur-rédacteur et auteur pour de nombreuses marques et médias belges et français. Spécialiste de l'actualité des familles royales, Nicolas a fondé le site Histoires royales dont il est le rédacteur en chef. nicolas@histoiresroyales.fr