Couronnement traditionnel du roi Misuzulu : le roi des Zoulous reconnu par les siens en entrant dans le kraal

Ce samedi 20 août 2022 avait lieu la très attendue cérémonie de couronnement du roi Misuzulu, un an et demi après être monté sur le trône. Le roi des Zoulous a participé à diverses cérémonies depuis quelques jours, avec comme point culminant l’entrée dans le kraal qui a eu lieu ce samedi, avec sur lui la peau du lion fraîchement tué.

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Dernière étape des rituels traditionnels de couronnement du roi Misuzulu

Depuis jeudi, divers rituels sont pratiqués dans la province de KwaZulu-Natal, dans le cadre du couronnement du roi Misuzulu, 47 ans. Bien qu’il n’y ait aucune couronne impliquée dans la cérémonie, il s’agit pourtant du terme utilisé officiellement en Afrique du Sud pour parler de l’installation du roi des Zoulous sur le trône qui lui permettra dorénavant de présider en toute légitimité son royaume traditionnel, rattaché à la province de KwaZulu-Natal.

Parmi les rituels importants pratiqués ces derniers jours, il y a le sacrifice d’un lion. Le roi a tué un lion en se rendant dans une réserve, un rituel instauré par le mythique roi Chaka, premier roi des Zoulous, que son propre père, le roi Goodwill Zwelithini avait lui aussi respecté lors de sa cérémonie de couronnement en 1971. Le lion est considéré lui-même comme un roi. Cette cérémonie symbolise donc un régicide, un roi tue un autre roi, signifiant sa prise de pouvoir.

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Le roi Misuzulu pénètre dans le kraal

Ce samedi 20 août avait lieu la dernière étape des cérémonies traditionnelles de couronnement. Dernière étape qui devait commencer dans la matinée mais qui a été repoussée à l’après-midi en raison d’une toute dernière action en justice, déposée en urgence par un membre de la famille souhaitant une ultime fois empêcher la cérémonie. Une fois cette demande rejetée en référé, la cérémonie a pu démarrer.

Le roi Misuzulu est arrivé au palais KwaKhangelamankengane de Nongoma, dans un costume traditionnel fabriqué avec la peau du lion tué deux jours plus tôt. Des milliers de personnes s’étaient rassemblées dans le petit village de Nongoma, considéré comme le village royal. Nongoma est situé à 300 kilomètres au nord de la capitale provinciale, Durban. C’est ici que se trouve le complexe royal, un ensemble de six palais où résident différentes épouses du défunt roi Goodwill Zwelithini.

L’acte de couronnement ou d’installation officielle du roi consiste à pénétrer dans le kraal. Le kraal est littéralement un « enclos à bétail ». La plupart du temps, il s’agit d’un enclos, qui peut encercler un petit hameau, délimité par une palissade en bois. Le kraal royal est un dérivé du kraal traditionnel et symbolise la protection du souverain par son peuple. Cette partie du rituel est considérée comme sacrée et lorsqu’il a pénétré dans le kraal, aucune caméra n’était autorisée à le suivre.

Dans le kraal, le roi a été présenté aux membres éminents de la communauté zouloue et aux ancêtres, défunts rois zoulous. Lorsque le roi est ressorti du kraal après plusieurs heures, il portait une autre tenue, dont une coiffe avec de grandes plumes noires et une tunique en longs poils noirs.

Après la cérémonie sacrée et secrète qui a duré plusieurs heures dans le kraal, le roi est ressorti paré de plumes et d’un costume à longs poils noirs (Photo : AP/ISOPIX)

La cérémonie a été scénarisée en s’inspirant des rituels pratiqués depuis des siècles et en particulier ceux instaurés durant l’ère Chaka. Après des siècles de clans et tribus dirigés par un chef, le royaume des Zoulous (ou Empire zoulou) fut un État reconnu lorsqu’il acquit son indépendance en 1816, sous le règne du roi Chaka.

Arbre généalogique de la famille royale zouloue, cousine de la famille royale swazie depuis peu, et descendante des chefs du clan zoulou (Image : Histoires Royales)

Le règne du roi Chaka est considéré comme l’apogée de la période zouloue. Le roi Cetshwayo, neveu du roi Chaka, vit quant à lui son royaume devenir le Zoulouland en 1883, et passer sous le contrôle britannique. Lorsque l’Afrique du Sud prit son indépendance en 1961, la république reconnut également une liste de royaumes traditionnels. Ces royaumes sont reconnus et confirmés par la Constitution sud-africaine de 1996.

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Les premiers discours du roi et de son entourage

Après cette cérémonie, le roi a été acclamé par les siens. Il a ensuite fait une petite pause dans l’une de ses résidences, le temps de se changer. Il est ressorti dans une tenue traditionnelle plus confortable, qui comprenait principalement une tunique en peau de léopard. Il a ensuite rejoint une tribune sous une tente, où l’attendaient des milliers de hauts dignitaires et des notables de la communauté zouloue.

Dans la tente, différentes autorités ont pris la parole et ont prononcé un discours pour féliciter le nouveau roi. Des représentants de rois traditionnels étrangers ont également prononcé quelques mots. Le roi Misuzulu, longtemps acclamé par des « Bayede ! » (l’équivalent de « Vive le roi ! » en langue zouloue), a enfin pris la parole. Le roi a remercié le président sud-africain d’avoir « courageusement » officialisé son règne. « Le roi Misuzulu a dit que la voie à suivre est désormais claire. Il s’engage à diriger son peuple même dans les moments difficiles. Il dit que depuis qu’il a été l’oint, il dirigera avec diligence », cite IOL.

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Le roi et son fidèle premier ministre, le prince Buthelezi sont également revenus sur la querelle qui divise la famille royale depuis qu’il est monté sur le trône en mai 2021. Ils ont fustigé leurs opposants qui doivent à présent être considérés comme des « ennemis ». En mai 2021, le roi Misuzulu a succédé à son père, le roi Goodwill Zwelithini, décédé deux mois plus tôt. La désignation de Misuzulu n’a pas fait l’unanimité au sein de la famille, entraînant divers recours en justice pour tenter de faire annuler son règne. En mars 2022, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a publié une ordonnance présidentielle dans laquelle il reconnaît Misuzulu en tant que roi des Zoulous.

La prochaine étape aura lieu fin du mois de septembre. Il s’agissait ici de la cérémonie traditionnelle, que le roi a déclaré considérer comme « plus importante » que celle qui se déroulera le mois prochain. Pourtant, il s’agira bien d’une cérémonie civile qui officialisera sa position au niveau de l’État. Cette cérémonie sera organisée au stade Moses Mabhida à Durban. Lors de cette grande cérémonie, où l’on attend un stade plein à craquer, le président Cyril Ramaphosa remettra définitivement son certificat au roi.

Une partie de la famille reproche à Misuzulu d’avoir volé sa place sur le trône. Normalement, au décès du roi, un conseil de famille se réunit pour élire le successeur parmi les princes de la famille. À la mort du roi Goodwill Zwelithini en mars 2021, son testament indiquait la nomination d’une de ses six épouses, la reine Mantfombi pour assurer la régence le temps de la période du deuil. À l’issue de cette période, le nouveau roi devait être désigné. Rien ne s’était déroulé comme prévu puisque la reine Mantfombi est décédée dans des conditions suspectes, au bout de trois semaines de régence. Le testament de la reine régente désignait son fils, Misuzulu, comme le nouveau roi. Le conseil de famille a bien voté en ce sens, suivant les directives de la défunte reine.

Depuis lors, toute une partie de la famille s’oppose à cette succession. Sa légitimité est pourtant confirmée par le président d’Afrique du Sud et Misuzulu bénéficie du soutien de son oncle, le roi Mswati III d’Eswatini. De nombreuses personnalités sud-africaines lui ont déjà publiquement accordé leur soutien, dont la princesse Charlène de Monaco, qui était très proche de feu Goodwill Zwelithini et qui a d’ailleurs assisté à ses funérailles à Nongoma en 2021.

L’article 212 de la constitution sud-africaine reconnaît un certain nombre de royaumes traditionnels, dans lesquels les monarques occupent un réel rôle de médiateur au niveau local et un rôle symbolique, en tant que garants de la préservation culturelle de leur tribu. Le roi Misuzulu Zulu est le souverain du peuple zoulou, anciennement regroupé dans le Zoulouland, qui aujourd’hui fait partie de la province sud-africaine du KwaZulu-Natal. Parmi les royaumes traditionnels, celui des Zoulous est le plus important en termes de population. On estime à un cinquième de la population sud-africaine appartenant à l’ethnie zouloue.

La population zouloue étant majoritairement regroupée dans la province du KwaZulu-Natal, qui correspond aussi approximativement au territoire de l’ancien Zoulouland, la famille royale zouloue a été attribuée comme souveraine de ce territoire, le roi des Zoulous y agissant comme un monarque constitutionnel. Par exemple, c’est le roi qui ouvre chaque nouvelle année parlementaire provinciale, comme le fait le roi en Norvège, aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni. La monarchie zouloue reçoit une subvention annuelle de l’État qui avoisine les 5 millions de dollars.

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Nicolas Fontaine

Rédacteur en chef

Nicolas Fontaine a été concepteur-rédacteur et auteur pour de nombreuses marques et médias belges et français. Spécialiste de l'actualité des familles royales, Nicolas a fondé le site Histoires royales dont il est le rédacteur en chef. nicolas@histoiresroyales.fr