Le 9 août 1830, le duc d’Orléans devient Louis-Philippe 1e, roi des Français. Débute alors la monarchie de Juillet, un régime qui prendra fin par la proclamation de la Deuxième république en 1848. Avant l’accession au trône du duc d’Orléans, une période floue de quelques jours, laissera la France sans chef d’État. Cette « Hésitation de 1830 » est une période durant laquelle plusieurs options, régimes et candidats potentiels ont été étudiés. Une république avec La Fayette ? Un retour bonapartiste avec Napoléon II ? Un Bourbon avec Henri V ? Et pourquoi pas un Orléans ?

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Les Trois Glorieuses et la fin du règne de Charles X
Les 27, 28 et 29 juillet 1830, de la revendication populaire, on passe à la révolte, puis à l’émeute et enfin à l’insurrection. Après une énième dissolution de la Chambre, différentes prises de position impopulaires et des défaites militaires, Charles X et son Premier ministre Polignac, sont à l’origine de sanglantes émeutes à Paris. Charles X tente de renvoyer son Premier ministre ultra et d’en nommer un plus modéré. Mais il est trop tard, au troisième jour l’insurrection, la Révolution de Juillet prit fin le 29 juillet 1830. Le dernier Bourbon de la branche aînée fut contraint de fuir et de mettre un terme à son règne.

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L’hésitation de 1830
Les jours qui succèdent la fin du règne de Charles X sont moins relatés dans les livres d’histoire. La transition entre le règne de Charles X et celui de Louis-Philippe 1e, est elle aussi pleine de rebondissements.
Dans les rues de Paris, fin juillet 1830, on pouvait entendre « Vive Napoléon II ». Des partisans de l’Empire n’avaient pas oublier l’existence du prince héritier de Napoléon, parti vivre en exil. Napoléon II avait été désigné comme successeur de son père, en 1815, mais le jeune héritier de 4 ans, fut remplacé au bout de deux semaines par Louis XVIII et sa coalition. En juillet 1830, le jeune prince impérial français est devenu un membre de la famille impériale d’Autriche, vivant à la cour de son grand-père, François 1e, et ayant même obtenu le titre autrichien de duc de Reichstadt. À cette époque, le jeune Napoléon II entamait sa carrière militaire, envoyé notamment en Hongrie.

Les partisans bonapartiste n’obtenant pas la faveur populaire, c’est l’option de la république qui parut être la plus sérieuse. Les députés républicains pensent alors à La Fayette comme parfait candidat. Le marquis, véritable héros aux Etats-Unis, est envisagé sérieusement. Âgé de 73 ans, et par un concours de circonstances, de lettres échangées, de la visite d’un ministre américain à Paris, et d’une guerre d’égos, le général La Fayette refuse la présidence : « Il est trop tard ! », s’est-il exclamé.

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L’éphémère règne du roi Henri V
Depuis que Charles X eut quitté son trône, les fidèles monarchistes ont continuer à militer pour le maintien de la monarchie. Dès le 30 juillet, le duc d’Orléans fut nommé Lieutenant-Général du Royaume, par les députés, une sorte de régent de transition. Il accepte le poste le 31 juillet. Adolphe Thiers, un ambitieux journaliste provincial monté à Paris, qui œuvra largement à la Révolution de Juillet et avait fondé un journal anti-Charles X, milita pour que le duc d’Orléans monte sur le trône.

Comprenant qu’aucun retour ne serait possible pour lui, Charles X, retiré à Rambouillet, accepte d’abdiquer le 2 août. Il reconnait son cousin, le duc d’Orléans comme Lieutenant-Général, et se sert de lui pour apporter la nouvelle de son abdication. Charles X fait contresigner son abdication par son fils, Louis-Antoine. De ce fait, il l’exclut de toute succession possible et dans sa lettre d’abdication, il nomme son petit-fils, Henri, duc de Bordeaux (connu plus tard comme le comte Chambord), comme son successeur. Le duc de Bordeaux n’a que 9 ans, et Charles X propose comme compromis, que le Lieutenant-Général, le duc d’Orléans, continue sa régence jusqu’à la majorité d’Henri. De facto, par cette lettre d’abdication, le jeune duc de Bordeaux est considéré par certains comme Henri V.
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Le duc d’Orléans se voit offrir les clés du royaume
Les négociations républicaines échouent, une république pourrait nuire à l’image de la France à l’étranger. Le candidat le plus sérieux, La Fayette, hésite et refuse. Les députés royalistes penchent alors pour le retour d’un roi, mais le temps des Bourbon semble révolu. Les regards se tournent alors vers la branche cadette de la famille Bourbon, les Orléans. Le duc d’Orléans est déjà connu, et joue au régent durant cette période d’hésitation. Le journaliste Adolphe Thiers va faire la publicité du duc d’Orléans en placardant des affiches dans Paris, rappelant ses actes héroïques à la bataille de Jemmapes et rappelant qu’il était « un prince dévoué à la cause de la Révolution. C’est du peuple français qu’il tiendra sa couronne. »
Au même moment, c’est le duc d’Orléans qui est envoyé pour annoncer l’abdication de son cousin, Charles X. Mais le duc d’Orléans, devant les députés, omettra de mentionner le passage où l’ancien roi nomme son petit-fils, Henri, comme successeur. La lettre d’abdication de Charles X commence pourtant par ces phrases : « J’ai donc pris la résolution d’abdiquer la couronne en faveur de mon petit-fils le Duc de Bordeaux. Le Dauphin, qui partage mes sentiments, renonce aussi à ses droits en faveur de son neveu. » Malgré tout, la lettre d’abdication sera publiée dans sa totalité, mais personne ne prêtera attention à la mention du règne du roi Henri V. Le sort des Bourbon était déjà scellé. Plus tard Louis-Philippe se justifiera sur la raison pour laquelle il n’a pas respecté les volontés de son cousin.

Le 3 août, Louis-Philippe préside à la cérémonie d’ouverture solennelle de la session parlementaire, au Palais Bourbon accompagné de son deuxième fils, le duc de Nemours. Les jours qui suivent, les débats font rage au parlement. Le 7 août, le duc d’Orléans, entouré de sa famille, écoute la décision de la chambre de lui confier les clés du royaume, sous le nom de règne de Louis-Philippe 1e. Pour ce règne « libéral », il devra renoncer à la monarchie absolue de droit divin. Son règne émanant de la volonté du parlement, il sera également « roi des Français » et non plus « roi de France ». Ce jour-là, l’émotion est vive. On dit que Louis-Philippe avait les larmes aux yeux. Après avoir indiqué qu’il n’avait jamais eu l’intention de s’emparer de la couronne, il accepte la mission qui lui est confiée, serrant la main de La Fayette, présent lors de ce moment solennelle. Le nouveau roi, la nouvelle reine Marie-Amélie et leur famille saluèrent la foule au balcon.
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Prestation de serment de Louis-Philippe 1e : début de la monarchie de Juillet
Le 8 août 1830, sont discutées les modalités du nouveau règne et l’organisation de la cérémonie d’intronisation. Le nouveau roi souhaite s’appeler Philippe VII, mais il doit y renoncer, cette appellation insinuant une continuité avec la Restauration. Les textes de prestation de serment sont modifiés afin d’enlever les parties qui font référence à un trône reçu « par la grâce de Dieu ».
Le 9 août, au palais Bourbon, dans la salle qui servait d’hémicycle provisoire pour recevoir la Chambre des députés, est organisée la prestation de serment. La couronne, le sceptre, le glaive et la main de justice sont posés sur des tabourets devant le trône. À 14 heures précises, le nouveau roi arrive, entouré de ses deux fils aînés. La lecture de la décision de la Chambre du 7 août est faite devant l’assemblée présente. Puis, Louis-Philippe « jure d’observer fidèlement la Charte constitutionnelle, avec les modifications exprimées dans la déclaration ; de ne gouverner que par les lois ; de faire rendre bonne et exacte justice à chacun selon son droit, et d’agir en toutes choses dans la seule vue de l’intérêt, du bonheur et de la gloire du peuple français. » Le Roi est acclamé et rentre au Palais-Royal. Ainsi commence la monarchie de Juillet, bien que celle-ci ait été proclamée au mois d’août.

Louis-Philippe connaitra à son tour des émeutes et sa révolution en 1848. Il fut le seul roi de la monarchie de Juillet, une monarchie de l’entre-deux, qui voulait éviter les excès du pouvoir populaire tout en limitant les abus du pouvoir royal. Son règne s’acheva par l’instauration de la Deuxième république en 1848.
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