Les regalia utilisés au couronnement de Charles III : des sceptres, des épées, des couronnes, un orbe, des bagues et une cuillère…

Le 6 mai 2023, le monde entier aura les yeux rivés sur l’abbaye de Westminster où le roi Charles III et la reine Camilla seront couronnés devant 2000 invités et des millions de téléspectateurs. Il s’agira d’une occasion unique de découvrir des rituels rares, faisant appel à un ensemble d’objets précieux et royaux, dont certains sont assez surprenants, comme une cuillère dont l’usage remonte au 14e siècle ou une ampoule en forme d’aigle.

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L’ampoule en forme d’aigle

Le roi Charles III et la reine Camilla partiront du palais de Buckingham, à bord du Carrosse d’État du Jubilé de diamant, le 6 mai 2023 pour rejoindre l’abbaye de Westminster où la cérémonie de couronnement débutera à 11 heures. Durant la cérémonie, aux rites majoritairement religieux, les souverains changeront à plusieurs reprises de vêtements et de couronnes pour marquer symboliquement leur consécration. Le roi Charles III portera par exemple le simple Colobium sindonis en lin blanc, avant de revêtir la Supertunica et le Manteau impérial.

Lors de la Procession du Roi (cortège aller), le couple royal voyagera à bord du Carrosse d’État du Jubilé de diamant. Lors de la Procession du couronnement (cortège retour), le couple royal utilisera le Carrosse d’État en or (Image : Histoires Royales)

Le roi Charles III ceindra la couronne de Saint-Édouard, alors que la reine Camilla a choisi de porter la couronne de couronnement de la reine Mary avec quelques modifications dans sa structure. Avant de sortir de l’abbaye, à la fin de la cérémonie, Charles quittera la couronne de Saint-Édouard et portera pour la première fois la couronne impériale, qu’il devrait ensuite porter chaque année lors de la cérémonie d’ouverture du parlement.

La couronne de la reine Mary compte environ 2200 diamants. Le Koh-i-Nor s’y trouvait aussi à l’origine. Camilla va y apporter quelques modifications, en ne gardant notamment que quatre arches au lieu de huit (Photo : PA Photos/ABACAPRESS.COM)

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Le moment le plus sacré de la cérémonie sera l’onction du roi par l’archevêque de Canterbury, qui signera le souverain avec de l’huile fabriquée et bénie dans l’église du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Il y a quelques jours, le patriarche Théophile III de Jérusalem a consacré le Saint-Chrême fabriqué à base d’huile d’oliviers du Jardin des oliviers.

Le patriarche Théophile III de Jérusalem mélange les deux huiles avant de les consacrer lors d’une cérémonie à Jérusalem ce 3 mars 2023 (Photo : capture d’écran vidéo)

L’huile se trouvera dans une ampoule en forme d’aigle, fabriquée en or. L’huile est versée par une ouverture dans le bec. Cette ampoule (Ampulla) a été créée pour le couronnement du roi Charles II en 1661 par le bijoutier Robert Vyner. Il s’agit d’un des regalia qui seront utilisés tout au long de la cérémonie. L’ampoule date du 17e siècle mais elle a été fabriquée sur base d’un ancien modèle légendaire. La légende raconte que la Vierge Marie sera apparue à Thomas Becket (un saint du 12e siècle) et lui aurait offert un aigle royal et une fiole d’huile pour oindre les futurs rois d’Angleterre.

L’ampoule en or en forme d’aigle est une fiole contenant l’huile sainte. Ici, avec la cuillère en vermeil qui recevra l’huile avant d’oindre le roi Charles III (Photo : Matt Dunham/PA Wire/ABACAPRESS.COM)

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La cuillère en vermeil, les éperons et les épées

Les regalia sont un ensemble d’objets sacrés ou traditionnels qui sont utilisés au cours d’une cérémonie ou d’un rituel royal. Les joyaux de la Couronne, telles les couronnes qui seront présentées le 6 mai prochain en font partie, mais il y a également d’autres objets moins connus, qui n’ont plus été utilisés depuis 70 ans, lors du couronnement de la reine Elizabeth II. Il y a par exemple la cuillère en vermeil qui a été utilisée pour oindre le roi Jacques 1e en 1603 puis a été utilisée pour les couronnements ultérieurs.

La plupart des joyaux royaux britanniques ont disparu lors de la période républicaine de Cromwell, au milieu du 17e siècle. Il a donc fallu recréer, souvent à l’identique, la plupart de ces objets, une fois la monarchie rétablie. La cuillère en vermeil est l’un des rares regalia authentiques à avoir échappé à la fonte. L’huile sainte est versée dans la cuillère avant d’oindre le roi. L’utilisation d’une cuillère lors des couronnements remonte au moins jusqu’au 14e siècle lors du couronnement de Saint-Édouard.

La plupart de ces regalia seront utilisés lors du couronnement de Charles III le 6 mai 2023. Ici, ceux utilisés lors du couronnement de son grand-père, George VI en 1936. Les 1 et 2 : les couronnes, les 3, 4, 5, 8 et 9 : les épées, les 6 et 7 : les orbes crucigères, les 10 et 11 : calice et plateau, le 12 : le sceptre du souverain avec colombe, le 13 : le sceptre du souverain avec croix, le 14 : les éperons et la bague, le 15 : l’ampoule et la cuillère, le 16 et le 17 : les bâtons (Photo : World History Archive / Alamy / Abacapress)

Le roi Charles III portera des éperons fabriqués en 1661 pour le roi Charles II. Ces éperons en or, en cuir et en velours du 17e siècle symbolisent la chevalerie. Ils ont été modifiés en 1820 pour le roi George IV. L’utilisation d’éperons pour le couronnement remonte à celui de Richard Cœur de Lion en 1189.

Trois autres épées seront utilisées lors de la procession du couronnement à l’abbaye de Westminster. Il y a tout d’abord l’épée de la justice temporelle qui symbolise le rôle du monarque en tant que chef des forces armées. L’épée de la justice spirituelle symbolise le rôle du monarque en tant que défenseur de la foi. Le souverain britannique est aussi le gouverneur suprême de l’Église d’Angleterre. Et l’épée de la miséricorde, appelée Curtana, a une pointe émoussée et rappelle la miséricorde du souverain. Les épées ont été utilisées pour la première fois lors du couronnement du roi Charles Ier en 1626, fabriquées avec des lames du 16e siècle et des poignées du début 17e siècle. Les trois épées sont portées sans leurs fourreaux, pointes vers le haut.

Une quatrième épée sera présente à l’abbaye mais non utilisée. Elle restera dans son fourreau de cuir recouvert d’or. Il s’agit de l’épée d’offrande qui a été fabriquée en 1820 pour le couronnement du roi George IV. Elle est sertie de bijoux formant une rose, un chardon, un trèfle, des feuilles de chêne, des glands et des têtes de lion.

Deux autres épées seront apportées devant le souverain. Il y a l’épée d’État, qui symbolise l’autorité royale. Avec sa lame en acier et sa garde en vermeil, elle reste dans son fourreau de bois recouvert de velours. Il s’agit d’une des deux épées fabriquées au 17e siècle, dont une seule subsiste aujourd’hui. La dernière épée, présentée pointe vers le haut, dans un fourreau portant les armoiries du roi Guillaume III, est utilisée lors des cérémonies d’investiture, notamment celle de Charles, en tant que prince de Galles en 1969.

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Les sceptres et bâtons

En plus des épées, on trouvera aussi deux masses en argent, plusieurs sceptres et des bâtons. Les masses en chêne sont recouvertes d’argent doré. Elles datent de la deuxième moitié du 17e siècle et sont des emblèmes de l’autorité. On les retrouve aussi lors des cérémonies d’ouverture du parlement. Les deux sceptres royaux sont aussi les emblèmes du souverain. Le sceptre avec croix représente le pouvoir temporel du souverain et sa bonne gouvernance, composé d’un bâton en or, surmonté d’un cœur en émail dans lequel est incrusté le diamant Cullinan I. Ce sceptre a été fabriqué pour le couronnement de Charles II mais le diamant n’a été ajouté qu’en 1901. Le deuxième sceptre appelé « Bâton de l’Équité et de la Miséricorde », est reconnaissable avec sa colombe. Il symbolise le rôle spirituel du souverain. La colombe a les ailes déployées, représentant le Saint-Esprit. Ce sceptre a aussi été créé au 17e siècle lors de la restauration de la monarchie par le bijoutier Robert Vyner.

L’orbe et le sceptre avec croix. Le sceptre surmonté d’un cœur en émail qui contient le diamant Cullinan I et une réplique de l’orbe crucigère (Photo : Antiqua Print Gallery / Alamy / Abacapress)

La reine Camilla aura elle aussi droit à son sceptre, fabriqué par Robert Vyner pour Marie de Modène, lors du couronnement de son époux, Jacques II, en 1685. Il est incrusté de cristaux de roche. Elle aura également un bâton en ivoire qui utilise aussi le symbole de la colombe (aux ailes fermées) qui représente l’équité et la miséricorde.

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Les armilles, l’orbe et les anneaux

Les armilles sont des bracelets en or champlevé et émail. Le champlevé est une technique de gravure qui consiste à creuser des cavités dans l’épaisseur du métal et ensuite de remplir ces cavités d’émail tout en laissant un dessin qui est formé par les cloisons. Les armilles, qui sont doublées de velours, symbolisent la force militaire datant de l’époque chevaleresque. Buckingham explique que lors des couronnements précédents, les armilles étaient désignées comme « bracelets de sincérité et de sagesse ». Elles ont été fabriquées au 17e siècle et sont utilisées depuis le couronnement de Charles II.

L’orbre crucigère divisé par des bandes de bijoux en trois parties représentant les trois continents, posé sur le cercueil de la reine Elizabeth II, avec la couronne impériale d’État et le sceptre (Photo : Tristan Fewings/PA Wire/ABACAPRESS.COM)

L’orbe crucigère est certainement l’un des regalia les plus connus avec les épées et les couronnes. Ce joyau représente le pouvoir spirituel du souverain. De nombreuses monarchies utilisent ce regalia en forme de sphère surmonté d’une croix, rappelant le monde chrétien, lors de ses rituels royaux. Cet orbe du 17e siècle est divisé en trois sections par trois bandes de bijoux et pierres précieuses. Les trois sections symbolisent les trois seuls continents connus à l’époque médiévale.

Enfin, les deux derniers objets importants sont les anneaux portés par le roi et la reine lors de leur couronnement. Il s’agit de deux grosses bagues. La bague du souverain est composée d’un saphir avec une croix formée par des rubis, le tout serti de diamant. « Symbole de la dignité royale », explique Buckingham, « l’anneau a été fabriqué pour le couronnement du roi Guillaume IV en 1831, et tous les souverains depuis le roi Édouard VII l’ont utilisé lors de leurs couronnements ».

La reine Camilla portera l’anneau de la reine consort. Il s’agit d’un gros rubis dans une monture en or. Cette imposante bague a été fabriquée pour le couronnement du roi Guillaume IV et de la reine Adélaïde en 1831. Par la suite, la reine Alexandra, épouse du roi Édouard VII, la reine Mary, épouse du roi George V, et la reine Elizabeth, épouse du roi George VI, l’ont également portée lors de leur cérémonie de couronnement respective.

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Nicolas Fontaine

Rédacteur en chef

Nicolas Fontaine a été concepteur-rédacteur et auteur pour de nombreuses marques et médias belges et français. Spécialiste de l'actualité des familles royales, Nicolas a fondé le site Histoires royales dont il est le rédacteur en chef. nicolas@histoiresroyales.fr